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Déclaration sur les Défenseurs des Droits Humains, l’inconnue dans la maison des Citoyens du Monde

In Being a World Citizen, Human Rights, International Justice, NGOs, Spirituality, The Search for Peace, Track II, United Nations, War Crimes, Women's Rights, World Law on January 10, 2024 at 7:00 AM

Par Bernard J. Henry

Voilà un mois tout juste, le 10 décembre dernier, la Déclaration universelle des Droits de l’Homme (DUDH) avait soixante-quinze ans. Pour le mouvement Citoyen du Monde, son adoption au Palais de Chaillot à Paris, qui accueillait cette année-là l’Assemblée générale de l’ONU, va de pair avec la venue de Garry Davis en France pour y renoncer à sa nationalité américaine puis tenter de venir camper sur le «territoire international» de l’ONU et, enfin, interrompre l’Assemblée générale avec Robert Sarrazac pour y exiger un gouvernement mondial et une assemblée des peuples. A l’autre bout du monde se créait la Société californienne des Citoyens du Monde d’où sortirait, en 1974, l’Association of World Citizens (AWC).

Un anniversaire, donc, mais pas une fête. Le pogrom antisémite du Hamas le 7 octobre dernier en Israël, la riposte entièrement démesurée du même Israël contre la population civile tout entière à Gaza, la répression toujours plus forte du régime de Vladimir Poutine en Russie à laquelle s’ajoute une campagne militaire déchaînée contre les civils dans son invasion de l’Ukraine, ainsi que les succès politiques en Europe, en Argentine et ailleurs de l’extrême droite, offrent à la vénérable doyenne du droit international des Droits Humains le bien triste cadeau de son oubli, du moins lorsqu’il s’agit de gouverner.

La veille, toutefois, avait déjà eu lieu un autre anniversaire, hélas passé inaperçu, celui d’une «proche parente» de la DUDH. Étaient-ce les soixante-quinze ans de la Convention pour la Prévention et la Répression du Crime de Génocide, adoptée le 9 décembre 1948 dans les mêmes murs du Palais de Chaillot ? C’est vrai aussi. Aînée d’un jour de la DUDH, la Convention a le mérite d’avoir su faire parler d’elle, jusqu’à aujourd’hui où, au milieu des accusations croissantes de «génocide» portées par la société civile palestinienne et internationale contre Israël au sujet de Gaza, d’aucuns se voient bien l’invoquer pour incriminer l’État hébreu devant les juridictions internationales. La «proche parente» dont l’anniversaire, qu’elle partage avec la Convention, a été oublié ou presque est autrement plus jeune, tout aussi essentielle à la société civile internationale que méconnue du grand public.

Née le 9 décembre 1998, soit un demi-siècle après la DUDH, à l’Assemblée générale des Nations Unies alors installée déjà de longue date en ses locaux attitrés de New York, elle porte un nom d’état-civil barbare : «Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus». Mais pour l’ONU elle-même, pour les juristes internationaux et pour les gens auxquels elle se destine, ces gens qui font partie de son nom même, elle s’appelle la Déclaration sur les Défenseurs des Droits de l’Homme (DDDH).

«Mieux vaut allumer une petite chandelle que maudire les ténèbres», affirme un proverbe chinois. Justement, en Chine, pour nombre de DDH persécutés, emprisonnés, parfois torturés par le pouvoir, qu’il s’agisse de Han, l’ethnie majoritaire à laquelle le monde résume souvent trop vite la population chinoise, ou de peuples envahis et occupés par la Chine comme les Tibétains ou les Ouïghours, la DUDH reste souvent cette dernière chandelle avant les ténèbres du désespoir sous les coups de la répression. En Chine d’où vient le proverbe, oui, «et, dans le monde, c’est partout pareil», comme le chantait Daniel Balavoine qui avait tant défendu les Droits Humains dans les textes de ses chansons.

Si la DUDH est une petite chandelle, alors, avec la DDDH, on en a deux et n’est-ce pas mieux encore ? Si, bien sûr. Et pourtant, la DDDH reste méconnue, dans l’ombre là où son illustre aînée demeure un phare même dans la pire nuit de tempête. C’est dommage. Tellement dommage, car, serait-elle tant soit peu mieux connue, la DDDH changerait bien des choses. Pour notre mouvement Citoyen du Monde, elle incarne notamment ce pour quoi les générations successives de nos militants se sont battues depuis Garry Davis – l’être humain, l’individu, libre de ses choix et responsable du bien commun au niveau du monde et de l’humanité.

La DDDH, inconnue parce qu’impuissante ?

Connaître mieux la DDDH commence par savoir déjà ce qu’elle est précisément. Une «déclaration» donc, adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU en tant que résolution, tout comme la DUDH en son temps. Donc, un appel de pure portée symbolique et morale, et non une convention, un traité que signent et/ou ratifient des États qui, dans la théorie, rendent ainsi ses dispositions pour lui contraignantes, ces dispositions que l’État Partie s’engage à respecter et mettre en œuvre en vertu de sa propre loi. Toujours dans la théorie, la DDDH créerait donc moins d’obligations pour les États, donc moins de droits pour le citoyen, que, par exemple, la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (CEDH).

Pas si vite.

En Droits Humains, un texte écrit, autrement dit un instrument de «droit positif», n’a jamais suffi à créer un droit qui soit respecté dans les actes. Même les deux Pactes internationaux issus de la DUDH, relatifs pour l’un aux droits économiques, sociaux et culturels et, pour l’autre, aux droits civils et politiques, bien qu’étant des traités contraignants pour les États qui les ratifient, sont loin d’avoir jamais garanti le respect ou la mise en œuvre des droits qu’ils consacrent. A plus forte raison, de simples déclarations devraient être encore moins bien considérées et la DUDH n’aurait jamais dû être plus qu’un vœu pieux. Comment a-t-il pu en être autrement ?

Si le droit international est parfois décrié comme manquant de muscle, il faut en revanche lui reconnaître qu’il ne manque pas de tête. En l’absence de toute police ou force militaire spécialement chargée de faire respecter le droit international face aux violations les plus graves – sachant qu’un système international, centré sur la volonté politique des États, la rendrait de toute façon peu manœuvrable et que, quand bien même, sitôt cette force activée, d’aucuns auraient tôt fait de crier à la tyrannie ! – le droit international tire sa force, particulièrement en ce qui concerne les Droits Humains, de la coutume, celle qui voit les États se conformer, par leur seule volonté politique, à des règles auxquelles ils estiment devoir obéir car elles ont à leurs yeux une valeur contraignante.

Voilà pourquoi la DUDH n’est pas restée lettre morte, étant devenue tout au contraire la clé de voûte de tout le système juridique international en la matière. La DDDH, qui en est tout à la fois la cadette, l’héritière et la complémentaire, incarne ces mêmes règles de droit international qui n’ont pas au départ de caractère contraignant mais en revêtent un car les États le lui reconnaissent de leur propre initiative. La manière même dont elle a été adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU le prouve, la DDDH étant devenue réalité non par un vote, comme l’avait fait la DUDH en 1948, mais par consensus, à savoir qu’il était tout simplement demandé aux États qui s’y opposaient de le faire savoir et aucun ne s’y est risqué. Par conviction profonde, magique de l’instant, de devoir respecter strictement ses dispositions ? Certainement beaucoup moins que par peur d’apparaître comme un État qui nie ouvertement toute importance aux DDH. C’est qu’un État, puissance souveraine ou pas, ça tient à son image …

Là où la DUDH avait été «élue» par l’Assemblée générale comme s’il s’était agi d’un parlement national, la DDDH a été «acceptée» selon une procédure quant à elle typique du droit international. Pour autant, sa nature est bien moins celle d’un instrument international que d’un texte de caractère mondial, car elle est née dans un monde lassé des nations toutes-puissantes et brûlant du désir de devenir un monde d’êtres humains.

La volonté du peuple du monde

Non, la DDDH n’est pas juste un cadeau d’anniversaire à une DUDH ayant atteint l’âge respectable de cinquante ans – respectable pour un texte de droit international, ses aïeux les traités de la Société des Nations pouvant la jalouser du fond de leurs tombes dans l’histoire du droit d’avoir eu autant de temps pour grandir. Elle est une enfant de son temps, une enfant de ces années 1990 où un monde sorti de la Guerre Froide découvrait que les atrocités de la Seconde Guerre Mondiale n’étaient pas si profondément enfouies dans l’histoire qu’il l’avait cru.

Un premier «réveil» avait eu lieu lors de la Conférence de Vienne en 1993, conférence sur les Droits Humains où le système en place jusqu’alors était apparu dans toute son inefficacité devant la purification ethnique en ex-Yougoslavie, cependant que la Somalie livrée au chaos et à la famine voyait l’opération internationale censée la secourir se transformer en une violente opération militaire contre le chef de l’une des factions de la guerre civile sur place.

Après la création du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie le 25 mai, une première depuis les Tribunaux militaires internationaux de Nuremberg et de Tokyo, un pas important avait été franchi avec la création du poste de Haut Commissaire des Nations Unies pour les Droits Humains. Le choix du premier titulaire avait toutefois déçu, en la personne de l’ancien Ministre équatorien des Affaires Étrangères José Ayala Lasso, accusé d’avoir été jadis un acteur de la dictature militaire dans son pays.

Mais même ce faux départ ne pouvait étouffer une réalité criante, celle de la volonté du peuple du monde par-delà les langues, les religions, les cultures et les frontières politiques, celle de l’exigence d’institutions internationales qui défendent les droits de chaque être humain, ces droits nécrosés pendant tout un demi-siècle et qui, la Guerre Froide terminée, revenaient enfin à leurs titulaires et s’affirmaient même comme une criante urgence.

C’était encore sans compter sur les deux années à venir, avec le génocide du Rwanda et les massacres des forces serbes de Bosnie-Herzégovine à Srebrenica et Žepa. Dans le premier cas, un second Tribunal pénal international ad hoc allait être créé par l’ONU et, avec lui, l’idée ressurgissait du fond de son après-guerre d’un tribunal pénal international permanent et universel, évoquée après les procès de Nuremberg et Tokyo mais gelée elle aussi par cinquante ans de Guerre Froide.

Le Général Ratko Mladić (g.) et le Président de la Republika Srpska, Radovan Karadžić, qui furent inculpés par le TPIY pour le massacre de Srebrenica en juillet 1995. (C) TPIY

C’est pourtant non sans mal que le 17 juillet 1998, à l’issue de la Conférence diplomatique de Rome, fut adopté le Statut de la Cour pénale internationale (CPI) sous réserve de sa ratification par soixante États, survenue en 2002. L’idée d’une juridiction internationale forte des Droits Humains avait plié sous le poids des réticences des gouvernements, notamment ceux des Etats-Unis et de France sur fond d’accusations d’abus commis par les troupes américaines en Somalie et françaises au Rwanda, ainsi qu’en Bosnie-Herzégovine où les Casques bleus français s’étaient vus accusés de partialité au profit de la Republika Srpska, la république serbe sécessionniste de Radovan Karadžić. A Rome même, les Etats-Unis s’étaient contentés de signer le Statut de la Cour pénale internationale sans le ratifier – signature ensuite retirée par l’Administration Bush – et la France, bien que devenue État Partie, ne s’était pas privée de dire tout le mal que lui inspirait l’idée du jugement de ses soldats par une juridiction non nationale.

L’idée restait toutefois la même : après la fin d’un demi-siècle de Guerre Froide avec, à la clé, la menace permanente d’une destruction nucléaire totale du monde, l’humanité n’accordait plus de crédit aux États pour leurs abus en matière de Droits Humains, et de ces institutions internationales censées incarner un nouvel ordre basé sur des règles universelles contraignantes, elle exigeait d’obliger les responsables de tels abus à payer cash.

Lamberto Dini, Président du Conseil de la République italienne, signe le Statut de la CPI lors de la Conférence diplomatique de Rome. (C) Nations Unies

Avec cette évolution juridique et judiciaire de taille, un principe se voyait consacré qui venait s’inscrire en faux contre l’idée traditionnelle du droit international depuis le temps même de la Société des Nations, le principe qui faisait de l’État le seul sujet possible dudit droit international : désormais passible de poursuites pénales devant des juridictions internationales, l’individu devenait lui aussi sujet de droit international, quoique de la pire des manières et au pire titre qui soit. Il manquait une reconnaissance de l’individu qui lui soit favorable et positive dans son esprit. Cinq mois plus tard, elle était là.

Défendre les droits sans plus avoir à choisir un camp

Même avec l’adoption de la DUDH, dont Garry Davis avait déclaré de manière bien optimiste qu’elle constituait la reconnaissance politique de l’individu sur le plan mondial, le principe de l’État comme seul sujet possible de droit international n’était pas remis en question, car la Déclaration, simple résolution de l’Assemblée générale, ne créait aucune obligation envers les États. Plus encore, les États étant les destinataires des droits dont l’individu se voyait ainsi fait titulaire, la DUDH subordonnait précisément ces droits au bon vouloir des États. Les Pactes internationaux qui en ont découlé n’ont fait que renforcer encore ce principe, même les États les plus déterminés à les respecter ayant eu la possibilité de les ratifier en émettant des réserves, autrement dit, de les ratifier «à la carte» en omettant certaines de leurs dispositions qui, peut-être, ne les arrangeaient pas.

Comment, dès lors, penser que la DDDH, elle aussi simple résolution de l’Assemblée générale et que ne vient compléter pour l’heure aucun pacte international, apporterait une reconnaissance plus réelle, a fortiori plus importante, de l’individu au niveau mondial ? Tout simplement en sortant du seul champ du droit positif pour intégrer celui de l’histoire de la notion même de DDH.

Sous la Guerre Froide, qu’était-ce donc qu’un DDH ? Bien sûr, une personne qui s’employait à la défense des droits énoncés dans la DUDH, définition première du terme. Mais dans ce contexte d’affrontement entre deux blocs par pays interposés, l’une ou l’autre des deux grandes puissances tentant d’installer ici ou là un régime allié et, pour éviter qu’il cesse un jour de l’être, dictatorial – l’un des deux grands n’ayant parfois fait qu’y remplacer l’autre, comme l’URSS à Cuba et au Nicaragua où avaient été délogés des tyrans alliés de Washington – un DDH était plus souvent perçu comme quelqu’un qui, dans un État tyrannique, défendait les droits en s’adossant au modèle proposé par celle des grandes puissances dont la tyrannie locale ne dépendait pas.

A l’Est, l’image d’Alexandre Soljenitsyne, auteur du légendaire Archipel du Goulag et exilé aux Etats-Unis où il habitait le Vermont, et à l’Ouest, celle du Chilien Pablo Neruda, homme politique communiste et surtout poète de renom, mort douze jours après le coup d’État du 11 septembre 1973 qui ouvrit la voie à la dictature militaire du Général Augusto Pinochet, officiellement d’un cancer de la prostate mais, selon d’autres sources persistantes, empoisonné par la dictature pro-américaine, trônaient dans les imaginaires des partisans d’un camp ou de l’autre, pour lesquels défendre les Droits Humains voulait dire au premier plan fustiger le camp adverse. Les critiques «internes» dans chaque camp se faisaient autrement plus rares, comme lorsque dans la France des années 1980, le Parti communiste se refusait à toute condamnation du tyran roumain Nicolae Ceausescu sur la même base que celle de la dictature de Pinochet au Chili ou quand le Front National, parti emblématique de l’extrême droite professant un anticommunisme reaganien, refusait de condamner l’apartheid en Afrique du Sud et appelait au contraire à ne pas «juger la RSA [acronyme de Republic of South Africa] selon des critères occidentaux». En ce qui concerne ce second parti, l’incohérence était telle qu’on le voyait prendre fait et cause pour les Juifs d’URSS empêchés par Moscou de rejoindre Israël alors même qu’en France, il qualifiait la Shoah de «point de détail» de l’histoire de la Seconde Guerre Mondiale …

Quoi qu’il en soit, lorsque les DDH se voyaient persécutés et qu’il fallait agir auprès de leurs gouvernements nationaux afin de les aider, il n’existait aucun texte international qui permît de mettre en avant la légitimité de leur travail, notamment pas pour les différencier de militants politiques plus classiques. De là à laisser entendre que la défense des Droits Humains était une simple option politique, pas plus défendable que celle choisie par le gouvernement qui décidait ainsi de réprimer ses DDH, il n’y avait qu’un pas, souvent très vite franchi.

En 1991, lorsque l’URSS a disparu et la Guerre Froide avec, cette iconographie du DDH défendant les victimes de l’un des deux systèmes au nom des valeurs défendues par l’autre avait fait long feu. Dès 1988, dans un monde où le Mur de Berlin était toujours debout, l’assassinat au Brésil du militant syndical et écologiste Francisco Alves Mendes Filho, dit Chico Mendes, avait mis en lumière la réalité du droit à l’environnement, non pas seulement contre les États mais aussi contre les entreprises multinationales tentées de le sacrifier pour le profit. Quatre ans plus tard, en 1992, l’an zéro de l’après-Guerre Froide, le Prix Nobel de la Paix remis à la militante guatémaltèque Rigoberta Menchú inaugurait l’image nouvelle du DDH, défendant des droits concrets, dans des contextes concrets, pour des populations concrètes, un DDH au sens réellement international du terme, traitant des questions pouvant exister partout dans le monde, un DDH avec lequel la grille de lecture jusqu’alors en vigueur perdait tout son sens. Il n’en fallait pas davantage pour que la Conférence de Vienne ne puisse que constater, l’année suivante, en 1993, que les mécanismes interétatiques de défense des Droits Humains nés sous la Guerre Froide avaient fait leur temps.

C’est dans ce contexte et au bout de ce processus d’évolution qu’a été adoptée fin 1998 la DDDH, consacrant l’individu non comme un acteur souverain et distinct des États comme le concevait Garry Davis, mais comme un acteur légitime du droit international et, à sa manière, des relations internationales qui échappaient désormais aux seules interactions entre les nations pour créer davantage un «espace mondial» selon la formule de Bertrand Badie, libéré du chantage permanent et systématique aux droits et libertés de la Guerre Froide et consacrant la défense des Droits Humains comme ce qui serait désormais le principe moteur de la vie politique mondiale. La Déclaration se montre à ce sujet sans ambiguïté puisqu’adoptée, dans les termes mêmes de son Préambule, en «[c]onsidérant les liens qui existent entre la paix et la sécurité internationales, d’une part, et la jouissance des droits de l’homme et des libertés fondamentales, d’autre part, et consciente du fait que l’absence de paix et de sécurité internationales n’excuse pas le non-respect de ces droits et libertés».

La préséance donnée à l’être humain sur l’État et, par voie de conséquence, à l’intérieur du système international lui-même est énoncée on ne peut plus clairement dans les deux premiers articles :

«Article premier

Chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international.

Article 2

1. Chaque État a, au premier chef, la responsabilité et le devoir de protéger, promouvoir et rendre effectifs tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales, notamment en adoptant les mesures nécessaires pour instaurer les conditions sociales, économiques, politique et autres ainsi que les garanties juridiques voulues pour que toutes les personnes relevant de sa juridiction puissent, individuellement ou en association avec d’autres, jouir en pratique de tous ces droits et de toutes ces libertés.

2. Chaque État adopte les mesures législatives, administratives et autres nécessaires pour assurer la garantie effective des droits et libertés visés par la présente Déclaration».

Sous la houlette d’Eleanor Roosevelt et René Cassin, la DUDH proclamait que l’ordre international d’après la Seconde Guerre Mondiale aurait au cœur de ses principes les Droits Humains. Cinquante ans plus tard, la DDDH venait proclamer à son tour que l’ordre international de l’après-Guerre Froide serait celui de la défense des droits des individus par les individus, non pas en dehors ou au mépris de l’État, mais en ayant droit à son soutien.

Si, un quart de siècle plus tard, le constat en la matière ne peut certes être que triste en ce qui concerne les résultats, pour ce qui est de l’urgence de la cause, il ne peut être qu’alarmant.

La WENA, une lumière qui s’éteint ?

En un quart de siècle, à travers le monde, les DDH se sont élevés et imposés comme une force politique internationale incontournable. Plusieurs Organisations Non-Gouvernementales (ONG) comme FrontLine Defenders et l’International Service for Human Rights (ISHR) consacrent toute leur action à les défendre. Qu’il s’agisse des droits civils et politiques mais aussi des droits sociaux, économiques, culturels, des droits des peuples autochtones et minorités ethniques, des droits liés à l’orientation sexuelle et l’identité de genre, des droits liés à la migration, à l’environnement, au développement, mais aussi des droits des femmes qui se trouvent systématiquement violés dès que tous ces types de violations apparaissent, les DDH sont actifs partout, sur tous les continents, que ce soit à un niveau local, au niveau national voire sur le plan international. Seulement, si la DDDH s’adressait au départ aux pays extérieurs à la WENA (Western Europe and North America, Europe occidentale et Amérique du Nord), une génération plus tard, la région considérée historiquement comme le berceau des Droits Humains peut se voir opposer à son tour la Déclaration tant il n’y est plus acquis d’être un DDH sans devoir en payer le prix.

C’est vrai ne serait-ce que pour un type précis de droits, ceux liés à la migration. Que ce soit aux Etats-Unis, tant sous Donald Trump qu’avec l’administration actuelle de Joe Biden, au Royaume-Uni sous les gouvernements conservateurs et l’impulsion notamment de la ministre Suella Braverman, ou encore en France avec l’adoption récente d’une «loi immigration» fortement empreinte des thèses de l’extrême droite pourtant vaincue à l’élection présidentielle de 2022 et dans l’opposition au Parlement, mais aussi de par les récents succès électoraux de l’extrême droite aux Pays-Bas ou en Suisse, le rejet des migrants et la xénophobie sous toutes ses formes n’ont cessé de progresser dans la WENA. Le rejet des migrants, et avec lui, celui de quiconque les aide à titre humanitaire ou les soutient face à la justice et aux pouvoirs publics. Ces DDH n’échappent plus à la pénalisation, comme ce fut le cas en France pour Martine Landry d’Amnesty International, Loan Torondel, Cédric Herrou et ceux que l’on a surnommés «les 7 de Briançon».

Aux droits des migrants s’ajouteront peut-être bientôt, dans cette WENA oublieuse de ses principes historiques, les droits des femmes. C’est ce que semble démontrer le cas de Vanessa Mendoza Cortés, psychologue et présidente d’une association féministe en Andorre, que le gouvernement de la petite principauté blottie entre France et Espagne a traînée en justice pour être allée s’exprimer sur les droits des femmes devant les Nations Unies – la nouvelle «mode» en matière de représailles contre les DDH étant en effet de pénaliser celles et ceux qui coopèrent avec les agences de l’ONU sur des thématiques locales ou nationales dans leur pays. L’intervention de l’AWC en sa faveur fut la première qui nous vit utiliser, dans l’une de nos interpellations écrites aux gouvernements nationaux en matière de Droits Humains, la langue catalane qui est officielle en Andorre !

Capture d’écran Amnesty International France

Pour Paulo Coelho, «Le monde change par votre exemple et non par votre opinion». Dans une WENA dont les gouvernements sont souvent prompts à donner des leçons en matière de Droits Humains au reste du monde, non dans une moindre mesure aux BRICS dont les membres, issus du Global South ou «Sud Mondial», s’en veulent les porte-parole dans une alternative économique – et politique – à l’hégémonie de la même WENA, un exemple aussi diamétralement opposé à l’opinion professée sera difficilement de nature à impressionner les gouvernements mis en cause, ou a fortiori à rassurer des DDH locaux regardant vers la WENA pour trouver encore inspiration et courage face aux coups portés par leurs gouvernants.

Dans leur essai de 2020 intitulé en anglais The Light that Failed, d’après un ouvrage de Rudyard Kipling intitulé en français La lumière qui s’éteint, Ivan Krastev et Stephen Holmes analysent l’échec de la WENA comme modèle pour les démocraties nouvelles issues de la fin de l’URSS et, a contrario, l’inspiration que d’aucuns dans les pays concernés, à commencer par Viktor Orban en Hongrie, ont fournie aux tenants du populisme en WENA comme Donald Trump. N’en déplaise à ces derniers, si l’on peut tenter de forcer le présent à singer le passé, aucun dictateur, aussi implacable soit-il, ne pourra jamais retourner la flèche du temps vers l’arrière, pas plus que ne le pourra jamais le vote le plus démocratique qui soit. L’an zéro de l’après-Guerre Froide, l’année 1992, est loin derrière nous, comme le sont 1993 et la Conférence de Vienne. Impossible de repartir à zéro sur la base d’un espoir failli. Mais rien n’empêche d’en créer un nouveau, qui soit cette fois pour le monde entier, WENA comprise. Et depuis vingt-cinq ans, un instrument du droit international des Droits Humains existe pour nous y aider. Il serait temps que l’on s’en rende compte et que l’on en fasse bon usage.

L’incarnation en droit international de la Citoyenneté Mondiale

Lorsque la DDDH a été adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU, dans ce qui est depuis 1952 sa résidence permanente sur l’East River à New York, l’histoire du mouvement Citoyen du Monde n’a pas retenu la présence de quiconque ayant tenté de camper devant les Nations Unies, ni d’une quelconque tentative d’interruption des débats pour lire une déclaration rédigée par un écrivain célèbre du moment. Tout s’est déroulé dans le calme le plus parfait, la procédure du consensus ayant même permis aux États les moins décidés, voire les plus réticents, de sauver tant soit peu la face. A vrai dire, la DDDH est même une œuvre anonyme, le temps des Roosevelt et des Cassin appartenant à l’histoire et les projets de résolutions étant désormais l’œuvre de professionnels spécialisés, qui sont et resteront donc, à la différence des légendaires promoteurs de la DUDH, des Inconnus dans la maison, pour reprendre le titre d’un ouvrage de Georges Simenon porté à l’écran en 1992 par Georges Lautner – dont ce fut la dernière réalisation – et où Jean-Paul Belmondo, jusqu’alors habitué aux films d’action et aux cascades, interprétait un rôle autrement moins exigeant sur le plan physique puisqu’il y incarnait un avocat.

«Inconnue dans la maison», celle des Citoyens du Monde, c’est ce qu’est la DDDH encore aujourd’hui. Elle qui, pourtant, incarne une forme de Citoyenneté Mondiale sans précédent dans l’histoire, celle d’une consécration de l’action civique individuelle en termes mondiaux, même à un pur niveau local, et de l’exigence de coopération signifiée aux autorités étatiques. Elle qui, à sa manière, incarne la Citoyenneté Mondiale telle que la conçoit l’AWC, «entièrement engagée» auprès des Nations Unies, selon les mots de feu notre Président-fondateur Douglas Mattern, et pour laquelle la Citoyenneté Mondiale se conçoit en plus de la citoyenneté nationale, non pas à la place, ce que rien ne prévoit non plus, du reste, au sein du système des Nations Unies. Elle qui, mieux connue et plus souvent revendiquée, ne pourrait que changer la vie publique pour le meilleur.

La DDDH ne crée pas d’immunité judiciaire ou diplomatique, elle n’est pas une charte de privilèges exonérant le citoyen de ses devoirs envers la communauté où il vit. Héritée du temps où le monde sortait d’une prise en otage permanente de son présent et de son avenir par deux pays le menaçant chacun d’un holocauste nucléaire, elle représente aujourd’hui la traduction en droit international public d’un droit devenu plus fondamental que jamais – celui de ne pas laisser aux seules autorités nationales la protection des droits de chaque personne et de prendre entre ses mains, pour elle-même et pour les autres, la défense de ces droits.

Invoquant lui aussi la Guerre Froide, alors qu’elle se profilait à l’horizon de l’automne 1948, ainsi que ce même droit de prendre sa vie et ses droits entre ses mains, Garry Davis était allé à l’ambassade américaine à Paris rendre sa nationalité et son passeport pour se déclarer Citoyen du Monde. Il s’attendait à être suivi de manière massive, mais si ses idées avaient en effet porté, les ambassades des divers États indépendants de la planète, autrement moins nombreux qu’aujourd’hui en ce temps-là, n’ont en revanche pas vu d’afflux de leurs citoyens venus leur rendre leurs passeports. Depuis un quart de siècle, la DDDH affirme que le civisme mondial n’implique aucune rupture avec l’État-nation et ne se définit pas par la seule possession d’une carte d’identité «mondiale» avec photo, mais par une prise de responsabilité altruiste et universaliste à la portée de toutes et tous.

En un mot, la Citoyenneté Mondiale existe déjà, non pas à titre symbolique mais en pur et vrai droit international. Et parce qu’elle la rend possible, la DDDH, l’inconnue dans la maison des Citoyens du Monde, mérite qu’on la connaisse plus. Et surtout mieux.

Bernard J. Henry est Officier des Relations Extérieures de l’Association of World Citizens.

«Pour toi Arménie» le monde doit faire cesser le blocus du Haut-Karabakh

In Being a World Citizen, Conflict Resolution, Current Events, Europe, Fighting Racism, Human Rights, Humanitarian Law, International Justice, NGOs, Spirituality, The former Soviet Union, The Search for Peace, United Nations, World Law on September 14, 2023 at 7:16 AM

Par Bernard J. Henry

«Même si tu maudis ton sort,

Dans tes yeux, je veux voir,

Arménie, une lueur d’espoir,

Une flamme, une envie

De prendre ton destin entre tes mains,

A bras le corps …»

Ces paroles écrites par Charles Aznavour, né Sharnough Aznavourian, font partie de Pour toi Arménie, la chanson dont il était l’auteur avec son beau-frère et complice musical de toujours Georges Garvarentz en 1988. Cet hommage amoureux à la terre de ses racines familiales, le plus célèbre des artistes franco-arméniens ne l’avait pas écrit seulement par un élan du cœur. Cette chanson était une urgence – l’urgence d’aider son Arménie frappée par un tremblement de terre meurtrier et dont la population déjà démunie s’était trouvée abandonnée à son sort.

Le 7 décembre 1988, la ville de Spitak, au nord de ce qui était alors la République socialiste soviétique d’Arménie au sein de l’URSS vivant la perestroïka de Mikhaïl Gorbatchev, à 11H41 très précises, un séisme de 6,9 sur l’échelle de Richter dévaste la ville. Dans cette Union soviétique qui avoue désormais ses faiblesses, les services de secours ne parviennent à sauver que quatre-vingts personnes des ruines des immeubles effondrés, tandis que vingt-cinq à trente mille personnes trouvent la mort, plus de quinze mille en sortent blessées et cinq cent trente mille n’ont désormais plus nulle part où vivre. Moscou et son affidée d’alors Erevan dépassées par l’ampleur du drame, la diaspora arménienne prend le relais et l’aide à la terre d’origine meurtrie s’organise – en dehors de l’Arménie.

Suivant l’exemple américain de Harry Belafonte, Quincy Jones et Lionel Richie en 1985 avec We Are the World pour l’Ethiopie, Aznavour rassemble quatre-vingt-huit autres chanteurs, acteurs et personnalités de la télévision avec lesquels il enregistre Pour toi Arménie en annonçant que tous les profits du 45 tours, en cette époque sans le streaming et où l’on achète encore des disques vinyles, iront à l’aide humanitaire sur place. Et le public répond présent, le 45 tours entrant directement premier au Top 50, le classement national hebdomadaire des ventes, dont il gardera la première place pendant plusieurs semaines. C’est Aznavour lui-même qui conclut la chanson par le nom de l’Arménie dans la langue nationale, «Hayastan !», tant en français qu’en italien et même en anglais, dans une version américaine que sa notoriété internationale lui permet d’enregistrer avec le soutien de nombreuses célébrités des écrans, grand et petit, ainsi que de la chanson comme Dionne Warwick.

Le 1er octobre prochain verra les cinq ans de la disparition de Charles Aznavour, artiste de légende, humanitaire mais aussi ambassadeur d’Arménie à l’UNESCO puis au Palais des Nations, dont l’Association of World Citizens (AWC) a un jour croisé le chemin pour venir en aide à une habitante de Erevan chassée de son domicile par des violences conjugales. S’il était encore des nôtres, comment réagirait-il au drame que vit actuellement l’Arménie, drame qui, contrairement à celui de Spitak en 1988, n’est pas le fait de la nature mais d’un ennemi bien plus dangereux encore pour l’être humain – lui-même ?

La seule absence de combat ne sera jamais la paix

Entre 1988 et 1994, l’Arménie et son voisin de l’est, l’Azerbaïdjan, républiques soviétiques avant de devenir indépendantes à la faveur de la disparition de l’Union soviétique fin 1991, se sont affrontées militairement autour d’un territoire voisin de l’Arménie, peuplé pour l’essentiel d’Arméniens mais appartenant juridiquement à l’Azerbaïdjan – le Haut-Karabakh, ou Nagorno-Karabakh, sur une partie duquel se tient la République d’Artsakh reconnue par Erevan. Soutenu par Gorbatchev du temps de l’URSS, l’Azerbaïdjan avait refusé tout transfert de souveraineté du Haut-Karabakh à l’Arménie, position qu’il a maintenue en tant qu’État souverain et maintient encore aujourd’hui.

(C) Bourrichon

En 1992, après plusieurs années d’un conflit dominé par l’Azerbaïdjan doté d’un large soutien du monde musulman, l’Arménie remporte de premières victoires décisives. Deux ans plus tard, en mai, c’est un Azerbaïdjan désormais épuisé par une nette domination militaire arménienne qui accepte une trêve, qui ne règle pas le conflit du Haut-Karabakh mais le «gèle» sans solution, laissant le territoire indépendant de facto mais non reconnu sur le plan international. Au cours des années, les liens avec l’Arménie vont se resserrer, culminant avec l’élection en 2008 d’un natif du Haut-Karabakh, Serge Sarkissian, à la présidence de l’Arménie qu’il occupera pendant dix ans. Entre l’Arménie et le Haut-Karabakh, un seul lien terrestre direct : le corridor de Latchine, large de quelques cinq kilomètres et long de soixante-cinq. Au-delà, l’Azerbaïdjan vaincu, rêvant d’une revanche au détour de l’histoire.

Fin septembre 2020, après le traumatisme d’une année marquée par la pandémie de Covid-19 et qui verra le monde quasi mis à l’arrêt, avec un tiers de la population de la planète confinée à son domicile, l’Azerbaïdjan prend de court une communauté internationale encore sous le choc en lançant une violente offensive contre le Haut-Karabakh. Cette fois, Bakou garde l’ascendant du début à la fin des hostilités, qui vient le 10 novembre avec un cessez-le-feu conclu à l’issue d’une médiation de la Fédération de Russie, avec de lourdes pertes de territoire pour l’Arménie qui doit de céder un tiers du Haut-Karabakh et en retirer ses troupes, Moscou déployant les siennes pour maintenir le cessez-le-feu. Pour les civils arméniens, c’est le temps de l’exil, non sans avoir pour beaucoup d’entre eux brûlé leur maison plutôt que de la voir accueillir des Azerbaïdjanais.

A Latchine, ce sont les forces de maintien de la paix russes qui prennent position, l’Arménie conservant le droit d’utiliser le passage terrestre avec le Haut-Karabakh. Seulement, à partir de février 2022, les mêmes forces armées russes qui maintiennent la paix entre Arménie et Azerbaïdjan deviennent aussi les forces d’invasion de l’Ukraine, qui vaut à Moscou une vaste et légitime condamnation internationale. Qui peut prétendre assurer la paix entre deux belligérants qui, dans le même temps, envahit son voisin ? L’Azerbaïdjan ne va pas tarder à le comprendre. Et dans cette paix qui n’en était pas une depuis la trêve de 1994, l’étant encore moins depuis le cessez-le-feu de 2020, Bakou va en tirer parti. De la pire manière qui soit.

En novembre 2020, des Yazidis se portent volontaires pour rejoindre les forces armées arméniennes et combattre au Haut-Karabakh (C) Armenian Army Media

L’arme de la faim et la «guerre sale» de Bakou

En cet automne 2020, entre Arménie et Azerbaïdjan, sur le Haut-Karabakh, match nul. Le bon moment, sans doute, pour entamer des discussions de paix entre les deux pays qui savent désormais chacun ce que c’est que d’être vainqueur et vaincu. Mais personne ne s’y aventure, et tout comme en 1994, la situation semble gelée sans espoir d’un dénouement définitif du conflit après plus de trente ans. Lorsque survient, du côté de l’Azerbaïdjan, l’impensable.

Le 12 décembre 2022, des Azerbaïdjanais se présentant comme des «militants écologistes» prennent position à l’entrée du corridor de Latchine, entendant bloquer une «exploitation illégale» de minerais locaux. Niant tout lien avec ces «militants écologistes» chez lesquels les slogans pour l’environnement cohabitent avec le drapeau azerbaïdjanais, le Président Ilham Aliyev se montre envers eux étonnamment indulgent par rapport à ses habitudes envers la société civile, habitudes dont nombre de militants ont payé le prix en cellule. Et pour cause, la société civile, la vraie, détient les preuves du lien direct entre ces «militants écologistes» et Bakou.

La preuve ultime, c’est justement Bakou qui la fournira lui-même, le 11 juillet dernier. Ce jour-là, ses propres troupes, drapeaux en main, bloquent désormais officiellement Latchine, accusant la Croix-Rouge de «contrebande» à l’occasion de ses livraisons d’aide humanitaire au Haut-Karabakh. L’organisation nie farouchement l’accusation, en effet de mauvaise foi puisque l’Azerbaïdjan prend pour prétexte les méfaits de quatre chauffeurs extérieurs à la Croix-Rouge qui, dans leurs véhicules personnels, ont tenté de faire passer «des marchandises commerciales» au Haut-Karabakh, bien sûr à l’insu de l’institution humanitaire qui a aussitôt mis fin à leurs contrats.

Mais, pour avoir tenté de réaliser un profit dérisoire, ces quatre malfaiteurs se voient toujours moins punis que le sont les Arméniens du Haut-Karabakh. Le territoire arménien en terre d’Azerbaïdjan se trouve désormais soumis à un blocus total, contraint à un rationnement de la nourriture et du gaz, et tout transfert médical d’urgence de patients vers Erevan est devenu impossible. Après avoir vaincu l’Arménie par les armes conventionnelles, l’Azerbaïdjan use désormais sans complexe contre les Arméniens de l’arme ultime, plus impitoyable encore que l’arme nucléaire qui abrégerait en quelques secondes les souffrances de celles et ceux qu’elle frapperait – l’arme de la faim.

Sous peu, le monde entier s’indigne. Fin août, un convoi humanitaire emmené par plusieurs élus politiques français de diverses tendances idéologiques, à l’exception notable et habituelle de l’extrême droite, se présente à Latchine en tentant de faire route vers le Haut-Karabakh. Pas de surprise – refoulé. Depuis l’Arménie, les dirigeants d’un think tank en appellent à la mise en place d’un pont aérien, à l’image de celui créé par les Alliés durant le blocus de Berlin en 1949. Fait exceptionnel, encore plus depuis le début de l’invasion de l’Ukraine en février 2022, Washington et Moscou se voient unanimes dans leur demande à Bakou en vue d’une levée du blocus du corridor de Latchine.

Au-delà de la politique, c’est le droit qui ne tarde pas à se manifester, le droit international pénal qui sait tout ce que le nom de l’Arménie signifie pour lui et pour son histoire.

D’un litige sur la souveraineté d’un territoire donné, le conflit prend soudain un goût amer de déjà-vu. Entre les Azerbaïdjanais descendants des Ottomans d’avant la Première Guerre Mondiale et les Arméniens victimes du génocide ottoman en 1915, c’est maintenant le souvenir du génocide qui se rallume dans les esprits, en Arménie et au Haut-Karabakh bien sûr mais, plus encore, dans le reste du monde.

Ronald Suny, professeur de science politique à l’Université du Michigan, cité par CNN, déclare : «Maintenant qu’il a gagné la guerre de 2020 contre l’Arménie, l’Azerbaïdjan a pour but ultime de chasser les Arméniens d’Artsakh hors de l’Azerbaïdjan. Mais plutôt que de recourir directement à la violence, qui susciterait les condamnations à l’étranger, Bakou est décidée à rendre la vie impossible aux Arméniens, les affamer et faire pression sur eux pour qu’ils partent». Pour l’International Association of Genocide Scholars (IAGS), aucun doute, le blocus du Haut-Karabakh engendre un risque de génocide.

Quant à Luis Moreno Ocampo, le premier Procureur de la Cour pénale internationale à sa création en 2002, dans une Opinion d’Expert datée du 7 août, il monte encore d’un cran en écrivant d’entrée «Il est en train de se produire un génocide contre 120 000 Arméniens vivant au Nagorno-Karabakh, également connu sous le nom d’Artsakh».

Sur le blog Social Europe, le spécialiste gréco-arménien des relations internationales George Meneshian appelle enfin l’Europe à «se réveiller» à la réalité du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, sous peine de devenir «complice de génocide».

Vouloir vaincre son adversaire en affamant sa population civile, c’est déjà en soi inhumain et lâche, surtout lorsqu’une victoire militaire nette vous place en position de force pour négocier un accord de paix. De la part de l’Azerbaïdjan, pourtant, ce n’est même pas le pire. Parler de génocide, c’est parler de la volonté d’exterminer un peuple, et qui parle d’exterminer un peuple parle d’une notion simple et claire – le racisme.

Capture d’écran de Nor Haratch, publication en ligne arménienne basée en France.

Contre le racisme envers les Arméniens d’Azerbaïdjan, l’arme du droit

Dans son argumentaire expert de vingt-huit pages, Luis Moreno Ocampo, montrant qu’il se souvient que la juridiction dont il a été le premier procureur est née de l’expérience aussi douloureuse qu’indispensable des Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et le Rwanda (TPIR), cite une abondance jurisprudence de l’un et de l’autre pour établir que, parce que le génocide ne s’avoue jamais, il peut et doit donc se déduire des actes du génocidaire, actes qu’il écrit reconnaître dans le blocus par l’Azerbaïdjan du corridor de Latchine.

Mais le magistrat sait aussi mettre un nom sur le premier mal qui frappe les Arméniens, sur la première faute de l’Azerbaïdjan, sur les premiers fondements de cette guerre de la faim. Un mal «prenant naissance dans l’esprit des hommes», dans les mots de l’Acte constitutif de l’UNESCO, tout comme le droit prend naissance dans l’esprit de l’être humain et, selon l’adage romain, ubi societas, ibi jus, là où il y a la société, il y a le droit. Et dans une société où sévit, voire règne, le racisme, il faut bien qu’il y ait le droit, celui de la Société Humaine Universelle que définit Olivier de Frouville, contre celui de la Société des Etats Souverains qu’il lui oppose et qui, comme jadis par exemple en Afrique du Sud, peut décider que le racisme est loi.

Bien que l’Arménie revendique le Haut-Karabakh et que la République d’Artsakh se veuille arménienne, techniquement et juridiquement parlant, les Arméniens du Haut-Karabakh demeurent des habitants de l’Azerbaïdjan, derrière le corridor de Latchine qui, sous blocus, ne peut plus jouer son rôle de lien terrestre unique avec l’Arménie. Derrière la rhétorique guerrière de Bakou et l’exemple qu’elle constitue de «création de l’ennemi» au sens que lui donne John Paul Lederach, ce que voient les instances internationales, à commencer par l’ONU, c’est bel et bien du racisme, celui des Azéris majoritaires en Azerbaïdjan contre les Arméniens de ce même pays qui demeurent, aux yeux de la communauté internationale, des Azerbaïdjanais. Et sur le racisme que subissent ces Azerbaïdjanais arméniens de la part de leurs compatriotes azéris, ce ne sont ni les faits ni les réactions qui manquent.

Le 21 avril 2023, le Représentant permanent de l’Arménie auprès du Siège des Nations Unies écrivait au Secrétaire Général, Antonio Guterres, en rappelant l’un des épisodes les plus tragiques de l’histoire des Arméniens d’Azerbaïdjan. Il parlait du massacre de Soumgaït, ville où, alors que l’Arménie soviétique commençait à revendiquer le Haut-Karabakh, un pogrom azéri avait décimé la population arménienne locale, causant des dizaines de morts, encore plus de blessés, des viols, des pillages et des destructions, toujours contre les mêmes – les Arméniens. Il rappelait les multiples condamnations de l’Azerbaïdjan, morales ou judiciaires, de la part des instances internationales, établissant un lien entre Soumgaït et la haine raciale contemporaine contre les Arméniens.

Et de la part de Erevan, il ne s’agissait pas de lawfare, de cette guerre judiciaire que l’on mène lorsque les armes n’ont pu vous apporter la victoire. Le racisme d’Etat azerbaïdjanais contre les Arméniens n’est pas une simple proclamation politique ; il est une réalité de terrain, et pour Bakou, il s’est mué en une excuse commode pour employer une arme sale, l’arme de la faim, contre le Haut-Karabakh.

Le 7 décembre 2021, à peine plus d’un an après la reprise des combats et la défaite arménienne, la Cour internationale de Justice statuait, saisie par l’Arménie, sur une demande de mesures conservatoires pour le respect de la Convention internationale sur l’Élimination de Toutes les Formes de Discrimination raciale (CIEDR), Erevan demandant à la Cour d’ordonner à l’Azerbaïdjan de changer d’attitude

«— en s’abstenant de se livrer à des pratiques de nettoyage ethnique contre les Arméniens ;

— en s’abstenant de commettre, de glorifier, de récompenser ou de cautionner des actes de racisme contre les Arméniens, y compris les prisonniers de guerre, les otages et d’autres détenus ;

— en s’abstenant de tenir ou de tolérer des discours haineux visant les Arméniens, y compris dans les ouvrages pédagogiques ;

— en s’abstenant de bannir la langue arménienne, de détruire le patrimoine culturel arménien ou d’éliminer de toute autre manière l’existence de la présence culturelle historique arménienne, ou d’empêcher les Arméniens d’avoir accès à celle‑ci et d’en jouir ;

— en punissant tout acte de discrimination raciale contre les Arméniens, qu’il soit commis dans la sphère publique ou privée, y compris lorsqu’il est le fait d’agents de l’État ;

— en garantissant aux Arméniens, y compris les prisonniers de guerre, les otages et d’autres détenus, la jouissance de leurs droits dans des conditions d’égalité ;

— en adoptant la législation nécessaire pour s’acquitter des obligations que lui fait la CIEDR ;

— en garantissant aux Arméniens un traitement égal devant les tribunaux et tout autre organe administrant la justice ainsi qu’une protection et une voie de recours effectives contre les actes de discrimination raciale ;

— en s’abstenant d’entraver l’enregistrement et les activités des ONG et d’arrêter, de détenir et de condamner les militants des droits de l’homme ou toute autre personne œuvrant pour la réconciliation avec l’Arménie et les Arméniens; et

— en prenant des mesures efficaces pour combattre les préjugés contre les Arméniens et des mesures spéciales pour assurer comme il convient le développement de ce groupe».

Dans sa décision, la Cour internationale de Justice avait finalement estimé que

«1) La République d’Azerbaïdjan doit, conformément aux obligations que lui impose la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

a) Par quatorze voix contre une,

Protéger contre les voies de fait et les sévices toutes les personnes arrêtées en relation avec le conflit de 2020 qui sont toujours en détention et garantir leur sûreté et leur droit à l’égalité devant la loi ;

b) A l’unanimité,

Prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher l’incitation et l’encouragement à la haine et à la discrimination raciales, y compris par ses agents et ses institutions publiques, à l’égard des personnes d’origine nationale ou ethnique arménienne ;

c) Par treize voix contre deux,

Prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher et punir les actes de dégradation et de profanation du patrimoine culturel arménien, notamment, mais pas seulement, les églises et autres lieux de culte, monuments, sites, cimetières et artefacts ;

2) A l’unanimité,

Les deux Parties doivent s’abstenir de tout acte qui risquerait d’aggraver ou d’étendre le différend dont la Cour est saisie ou d’en rendre le règlement plus difficile».

La haute juridiction onusienne reconnaissait ainsi que la question du Haut-Karabakh n’était pas, ou n’était plus, seulement celle de la souveraineté sur ce territoire de l’un ou de l’autre des deux pays qui le réclamait. Il s’agissait bien, au-delà d’une simple dispute territoriale, de racisme.

Et comme le relève Luis Moreno Ocampo dans son Opinion d’Expert, le 22 septembre 2022, dans ses Observations finales concernant le rapport de l’Azerbaïdjan valant dixième à douzième rapports périodiques, le Comité CIEDR fustigeait le pays pour «[l’]incitation à la haine raciale et la propagation de stéréotypes racistes à l’encontre de personnes d’origine nationale ou ethnique arménienne, notamment sur Internet et dans les médias sociaux, ainsi que par des personnalités publiques et des hauts responsables, et le manque d’informations détaillées sur les enquêtes, les poursuites, les déclarations de culpabilité et les sanctions liées à de tels actes». Une constante de racisme par trop voyante pour que Bakou puisse réduire le blocus du Haut-Karabakh à une simple protestation d’écologistes ou, aujourd’hui, à une mesure devant empêcher la contrebande, excuses si faciles qu’elles en deviennent insultantes.

Notre époque a appris, et Luis Moreno Ocampo a bien compris que c’était là qu’il fallait frapper d’entrée, à oublier les génocides, du moins à les minimiser. Là où jadis, l’évocation de la Shoah juive, du Samudaripen rom ou, justement, du génocide arménien amenait une autorité morale au propos tenu, aujourd’hui, sous prétexte de «point Godwin», il devient quasi disqualifiant d’y faire référence. Admettons, entendu, soulever un génocide, c’est un pathos alarmiste. Mais alors, que dire de l’effroyable niveau de racisme contre les Arméniens constaté et condamné plus d’une fois par l’ONU en Azerbaïdjan, sinon qu’il est la meilleure preuve que le blocus du corridor de Latchine représente, si ce n’est un génocide en soi, du moins son ultime prélude ?

Une certaine conception de l’humanité mise à l’épreuve

S’il s’était parfois mis dans la peau des losers, comme dans Je m’voyais déjà, Poker et Je ne peux pas rentrer chez moi, Charles Aznavour chantait aussi pour dénoncer l’injustice, chantant Comme ils disent en 1972 alors que l’homosexualité est en France réprimée comme un délit, Mourir d’aimer sur l’affaire Gabrielle Russier et Les émigrants en pleine ascension du Front National et de ses thèses xénophobes. Légitime à écrire et produire Pour toi Arménie, il ne l’était pas du seul fait d’être arménien d’origine mais parce que son travail d’artiste parlait pour lui. Autrement, qui sait si l’initiative aurait rencontré le même succès ?

De même que Pour toi Arménie n’avait rien d’un phénomène «de fait», ici le fait d’un chanteur français d’origine arménienne, il n’existe aucune paix «de fait» après un conflit, la paix se construisant, sinon avant la fin des hostilités, du moins dès qu’elle intervient puis sans cesse jusqu’à ce que les belligérants comprennent qu’un accord, ou traité, formel doit sceller pour toujours leur bonne volonté et ouvrir la voie à l’avenir. Ce travail réalisé en 1994, l’offensive azerbaïdjanaise de 2020 serait devenue bien moins probable, et avec elle, cette guerre de la faim d’aujourd’hui.

En Ukraine se joue la survie d’une certaine conception du droit international, celle qui veut que l’agresseur ne soit pas récompensé de sa conduite contre l’agressé, sanctions de divers ordres à l’appui contre Moscou. Plus au nord, au Haut-Karabakh, l’enjeu n’a pas besoin pour se définir d’un manuel de droit. Lorsque l’arme choisie contre l’ennemi désigné est la faim, c’est bien une certaine conception de l’humanité qui est mise à l’épreuve, une conception qui transcende les frontières des États, qu’elles soient ou non reconnues par les autres États, une conception qui accorde toute sa valeur au droit, même s’il ne produit pas d’effet immédiat car il n’en incarne pas moins les principes qui guident une conscience. Cette conception, soit le monde agit pour la défendre au Haut-Karabakh, soit il s’expose à ce qu’elle ne soit plus garantie nulle part.

Bernard J. Henry est Officier des Relations Extérieures de l’Association of World Citizens.

Yemen: Positive Action Still Needed

In Being a World Citizen, Conflict Resolution, Current Events, Humanitarian Law, Middle East & North Africa, NGOs, Spirituality, The Search for Peace, Track II, United Nations, War Crimes, Women's Rights, World Law, Yemen on April 16, 2023 at 9:07 AM

By René Wadlow

March 25 is the anniversary date of the start of 28 days on continued bombing of Yemen in 2015 by the Saudi-Arabia-led coalition (Bahrain, Egypt, Jordan, Kuwait, Morocco, Qatar, Sudan, United Arab Emirates helped by arms and “intelligence” from the USA and the UK). The aggression by the Saudi coalition turned what had been an internal struggle for power going on from the “Arab Spring” of 2011 into a war with regional dimensions which brought Iran into the picture. The role of Iran has been exaggerated both by the Iranian government itself and by those hostile to Iran. Nevertheless, the Iranian role is real.

Yemeni children play in the rubble of buildings destroyed in an air raid. (C) Peter Biro/European Union

Since the Association of World Citizens (AWC) had been following possible constitutional developments in Yemen after the 2011 change of government, a couple of days after the March 25, 2015 bombing, the AWC sent to governmental missions to the United Nations (UN) an AWC Appeal for four steps of conflict resolution and negotiations in good faith:

1) An immediate ceasefire ending all foreign military attacks;
2) Humanitarian assistance, especially important for hard-to-reach zones;
3) A broad national dialogue;
4) Through this dialogue, the establishment of an inclusive unity government open to constitutional changes to facilitate better the wide geographic- tribal structure of the State.

While the constitutional form of the State structures depends on the will of the people of Yemen (provided they can express themselves freely), the AWC proposes consideration of con-federal forms of government which maintain cooperation within a decentralized framework. In 2014, a committee appointed by the then President, Abdu Rabbu Mansur Hadi, had proposed a six-region federation as the political structure for Yemen.

Until 1990, Yemen was two separate States: The People’s Democratic of Yemen in the south with Aden as the capital, and the Yemen Arab Republic in the north with Sana’a as its capital. In 1990, the two united to become the Republic of Yemen. The people in the south hoped that the union would bring the economic development which had been promised. Since, even before the Saudi-led war began, there had been very little economic and social development in the south, there started to grow strong “separatist” attitudes in the south. People of all political persuasions hoped to develop prosperity by ending unification and creating what some have started calling “South Arabia” Today, these separatist attitudes are very strong, but there is no agreement on what areas are to be included in a new southern state, and the is no unified separatist political leadership.

Very quickly after March 25, 2015, many governments saw the dangers of the conflict and the possible regional destabilization. Thus, there were UN-sponsored negotiations held in Geneva in June 2015. The AWC worked with other nongovernmental organizations (NGO) so that women should be directly involved in such negotiations. However, women have not been added to any of the negotiations and are largely absent from any leadership role in the many political factions of the country. There have been UN mediators active in trying to get ceasefires and then negotiations. There have been some temporary ceasefires, but no progress on real negotiations.

Today, the war continues with the country’s fragmentation, continued internal fighting and impoverishment leading to a disastrous humanitarian crisis. There is a glimmer of possible conflict resolution efforts due to the recent mutual recognition of Saudi Arabia and Iran under the sponsorship of the People’s Republic of China. However, creating a national society of individuals willing to cooperate will not be easy. Regional divisions will not be easy to bridge. There have already been divisions within the Saudi-led Coalition. Thus, positive action is still needed. NGOs should seek to have their voices heard.

Prof. René Wadlow is President of the Association of World Citizens.

UN Human Rights Rapporteurs Concerned by Rape, Forced Conversion and Marriage to Rapists in Pakistan

In Asia, Cultural Bridges, Current Events, Human Rights, NGOs, Solidarity, Spirituality, Track II, United Nations, World Law on January 21, 2023 at 8:41 PM

By René Wadlow

The Human Rights Council, building on the earlier practice of the United Nations (UN) Commission on Human Rights, has a number of Special Rapporteurs devoted to certain themes – usually specific violations of human rights – or to specific countries. These Special Rapporteurs are independent experts selected by the Council. They usually report their findings at each session of the Council. When violations concern more than one issue, there can be joint Reports to the Council or joint Appeals to a government. Such a collective Appeal to the government of Pakistan sent on October 26, 2022 was made public on January 15, 2023.

The joint Appeal by six Special Rapporteurs concerned the sequence of rape of young women, forced conversion to Islam, followed by marriage to the rapist. The Appeal was led by the Special Rapporteur on Freedom of Religion or Belief, the Special Rapporteur on Sexual Exploitation of Children, the Special Rapporteur on Violence against Women and Girls, and the Special Rapporteur on Trafficking in Persons, especially Women and Children. The subject of the Appeal is not new, having been raised previously by Nongovernmental Organizations (NGOs), including by the Association of World Citizens (AWC).

However, the Appeal by the Special Rapporteurs clearly identifies a systemic problem on which the Pakistani government has failed to act. The girls raped are usually minors under 18 years of age and belong to Hindu and Christian minorities of the country, often rural and poor. Most Christians in Pakistan are converts from low caste or “untouchables” (Dalit) Hindus. Seeing no future within the Hindu-influenced caste system, they converted to Christianity which has no caste structure. Most of the Pakistani Hindus and Christians are illiterate and have little or no political influence.

A peace tour arranged by different social activists and minority rights activists in Lahore, Pakistan, with the participation of Muslim, Christian and Hindu youth. (C) RedMiNote

The Pakistani police and the court employees are agents of these human rights violations. Illiterate parents sign with a thumbprint document that they do not understand and are then filled in by the police to attest that the girl is older than 18, the legal age for marriage. If the girl or her family agrees to the marriage with the rapist, the rapist cannot be arrested and tried for the rape. As the practice takes place usually in rural areas, there are few if any NGOs to take up the specific cases. Urbanized Christian groups in Pakistan have made some protests of the practice but are often unaware of the specific rural cases.

NGOs have brought evidence of the practice to the attention of the Geneva-based Special Rapporteurs. When a human rights violation is given to the UN human rights secretariat, it is sent on to the Geneva-based Ambassador of the country mentioned. The Ambassador may not reply at all or more usually will reply saying that the facts are incorrect or deliberately misleading. However, as in the Pakistani case, the evidence piles up. In this current situation, there is, two months ago, a newly appointed High Commissioner for Human Rights, Volker Turk, formerly UN Undersecretary-General for Policy. The Special Rapporteurs may have wanted to see how he will act on violations of a powerful country. The situation in Pakistan merits close watching.

Prof. René Wadlow is President of the Association of World Citizens.

Nonviolent Action: The Force of the Soul

In Africa, Anticolonialism, Asia, Being a World Citizen, Cultural Bridges, Nonviolence, Solidarity, Spirituality, The Search for Peace, United Nations on October 2, 2022 at 5:00 PM

By René Wadlow

October 2 is the United Nations (UN) General Assembly-designated Day of Nonviolence chosen as October 2 is the birth anniversary of Mahatma Gandhi.

Mahatma Gandhi, shortly after finishing his legal studies in England, went to South Africa and began working with Indian laborers, victims of discrimination. He looked for a term understandable to a largely English-speaking population to explain his efforts. “Passive resistance” was the most widely used term and had been used by Leo Tolstoy and others. However, Gandhi found the word “passive” misleading. There did exist a Hindu term, ahinsaa meaning non- and hinsa, violence. The term was basically unknown among White South Africans, largely uninterested in Indian philosophical thought.

Gandhi wrote to a friend from his legal studies days in England, Edward Maitland. Maitland and Anna Kingsford were the leaders of the Esoteric Christian Union and the leaders of the London Lodge of the Theosophical Society. Maitland introduced Gandhi to the writings of the American New Thought writer Ralph Waldo Trine. Trine was a New Englander and his parents named him after Emerson. His best-known work from which Gandhi took the term for his actions in South Africa is In Tune with the Infinite or Fullness of Peace Power and Plenty. (1)

Trine uses the term “soul force” which Gandhi then used for his work in South Africa. Once back in India, Gandhi wanted an Indian rather than an English expression, and he coined the term satyagraha − holding on to truth: satya as Truth in a cosmic sense is an oft-used Hindu term while “soul” would need some explaining to Indian followers.

All of Trine’s writings contained the same message: soul force could be acquired by making oneself one with God, who was immanent, through love and service to one’s fellow men. The Christ Trine followed was one familiar to Gandhi − the supreme spiritual exemplar who showed men the way to union with their divine essence. Trine promised that the true seeker, fearless and forgetful of self-interest, will be so filled with the power of God working through him that “as he goes here and there, he can continually send out influences of the most potent and powerful nature that will reach the uttermost parts of the world.”

For Trine, thought was the way that a person came into tune with the Infinite. “Each is building his own world. We both build from within, and we attract from without. Thought is the force with which we build, for thoughts are forces. Like builds like and like attracts like. In the degree that thought is spiritualized does it become more subtle and powerful in its workings. This spiritualizing is in accordance with law and is within the power of all.

“Everything is first worked out in the unseen before it is manifested in the seen, in the ideal before it is realized in the real, in the spiritual before it shows forth in the material. The realm of the unseen is the realm of cause. The realm of the seen is the realm of effect. The nature of effect is always determined and conditioned by the nature of its cause.”

Thus, for Mahatma Gandhi, before a nonviolent action or campaign, there was a long period of spiritual preparation of both him and his close co-workers. Prayer, fasting, and meditation were used in order to focus the force of the soul, to visualize a positive outcome and to develop harmlessness to those opposed.

Another theme which Trine stressed and Gandhi constantly used in his efforts to build bridges between Hindus and Muslims was that there was a basic core common to all religions. Gandhi wrote “There is a golden thread that runs through every religion in the world. There is a golden thread that runs through the lives and the teachings of all the prophets, seers, sages, and saviors in the world’s history, through the lives of all men and women of truly great and lasting power. The great central fact of the universe is that the spirit of infinite life and power is back of all, manifests itself in and through all. This spirit of infinite life and power that is back of all is what I call God. I care not what term you may use, be it Kindly Light, Providence, the Over-Soul, Omnipotence or whatever term may be most convenient, so long as we are agreed in regard to the great central fact itself.”

Note:

(1) R.W. Trine, In Tune with the Infinite (New York: Whitecombe and Tombs, 1899, 175 pp.)

Prof. René Wadlow is President of the Association of World Citizens.

1989, l’affaire Salman Rushdie : Quand la France célébrait sa Révolution sous les feux croisés de l’obscurantisme

In Africa, Being a World Citizen, Cultural Bridges, Current Events, Democracy, Europe, Human Rights, Literature, Middle East & North Africa, NGOs, Solidarity, Spirituality, The Search for Peace, United Nations on August 15, 2022 at 1:02 PM

Par Bernard J. Henry

Après les Etats-Unis en 1976, les Français ont célébré en 1989 le Bicentenaire de la Révolution qui a créé leur république, avec pour traits d’union entre les deux pays le Marquis de la Fayette, «héros des deux mondes» en France comme le deviendrait plus tard Giuseppe Garibaldi en Italie, et le fameux «Ça ira» de Benjamin Franklin, Ministre des Etats-Unis d’Amérique à Paris mais francophone malhabile qui, lorsqu’on lui demandait des nouvelles de son pays, répondait par ces deux seuls mots que les sans-culottes avaient fini par reprendre à leur profit. Mais en France, l’année 1989 fut loin d’être placée sous le seul signe des idéaux de la Révolution française tels que résumés en sa devise officielle – Liberté, Égalité, Fraternité.

Depuis le début des années 1980, la France était régulièrement frappée par le terrorisme lié au conflit israélo-palestinien, comme lorsque fut frappé voici quarante ans ce mois-ci, le 9 août 1982, le restaurant Jo Goldenberg dans le quartier juif de Paris. Depuis les élections municipales de 1983 et dans des proportions sans précédent depuis la Libération, l’extrême droite reprenait pied dans la politique française avec les succès électoraux du Front National, dénoncés ainsi que la complaisance du reste de la classe politique par Louis Chedid dans Anne, ma sœur Anne.

C’était déjà beaucoup, évidemment trop. Mais ce n’était pourtant qu’un début, et bientôt une France déjà en proie à ses propres démons allait se trouver prise au cœur de luttes d’envergure mondiale, luttes qui, bien que jamais vraiment disparues, viennent aujourd’hui se rappeler tragiquement au souvenir non seulement de la France mais du monde entier, avec l’agression de Salman Rushdie le 12 août dans l’État de New York.

La Dernière Tentation du Christ : la Contre-Révolution contre-attaque

Le réalisateur américain Martin Scorsese (C) David Shankbone

En août 1988, le cinéaste américain Martin Scorsese sort son nouveau film, La Dernière Tentation du Christ, d’après un roman de Níkos Kazantzákis. En rupture directe avec les récits bibliques, Scorsese y dépeint un Jésus vivant comme tout mortel, peu soucieux du péché ou de la foi, et qui prend soudainement conscience de sa mission divine puis entame un parcours messianique en s’opposant aux dirigeants mêmes du peuple juif dont il est issu. Devant les caméras de Scorsese, c’est Jésus lui-même qui demande à Judas, son premier adepte, de le dénoncer aux Romains afin d’être arrêté et mourir en martyr. Mais, alors qu’il attend la mort sur sa croix, Jésus se voit offrir le salut par un ange qui vient lui dire qu’il est Fils de Dieu, mais non pas le Messie, et doit vivre en homme normal. Sauvé par l’ange de la crucifixion, Jésus épouse Marie-Madeleine et fonde avec elle une famille heureuse.

A la fin de sa vie, Jésus appelle auprès de lui ses anciens disciples et Judas lui avoue que l’ange qui l’a sauvé était en réalité Satan, dont lui est venue cette «dernière tentation» de vivre en homme ordinaire et non en Messie. Mourant, Jésus rampe jusqu’à la croix dont Satan l’avait jadis extrait, dans une Jérusalem en flammes puisque n’ayant jamais été pacifiée par son enseignement. Il implore Dieu de le replacer sur la croix, afin de pouvoir enfin accomplir sa destinée. Crucifié une nouvelle fois, il sait sa mission menée à bien et meurt.

Cette uchronie religieuse soulève la fureur chez les Chrétiens à travers le monde entier, d’abord chez les Protestants aux Etats-Unis même puis, en France, chez les Catholiques, l’Archevêque de Paris Jean-Marie Lustiger parvenant même à faire plier le Gouvernement socialiste de François Mitterrand qui, d’abord partenaire du film, finit par jeter l’éponge.

A sa sortie en France en septembre, le film réveille un mouvement catholique intégriste que l’on croyait décapité depuis l’excommunication au printemps de Monseigneur Marcel Lefebvre et la mise au ban par le Vatican de sa Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X traditionaliste et hostile à Vatican II. En octobre, un cinéma projetant La Dernière Tentation du Christ est incendié dans l’est de la France et, à Metz, la visite du Pape Jean-Paul II donne lieu au retrait du film des salles locales. Bientôt, le film est déprogrammé partout ailleurs ou projeté sous protection policière. Le 23 octobre, un commando catholique intégriste attaque l’Espace Saint-Michel à Paris, dernière salle projetant encore le film, blessant quatorze personnes dont deux grièvement.

En pleine célébration de sa Révolution et de l’Être suprême, divinité laïque sous les auspices de laquelle était adoptée le 26 août 1789 la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, la France découvre que l’esprit vengeur des Chouans de Bretagne et des royalistes de Vendée qui refusaient la fin de la monarchie de droit divin était toujours là, et que, comme leurs ancêtres révolutionnaires, les Français républicains de 1989 allaient devoir y faire face. Et à l’intégrisme catholique menaçant le Bicentenaire allait bientôt s’ajouter l’intégrisme issu des rangs d’une autre religion majeure de France – l’Islam.

Allah et Les Versets sataniques : les «intégristes musulmans» à l’assaut de l’Être suprême

En 1989, la France ne parle pas encore d’islamisme. Ce terme n’apparaît que l’année suivante, lorsque les premières élections libres et multipartites en Algérie voient non pas la victoire courue d’avance du Front de Libération Nationale (FLN), jusqu’alors parti unique, mais du Front islamique du Salut (FIS), parti prônant une application stricte de la loi coranique dans tous les domaines de l’administration et de la vie publique. Pour l’instant, en cette année 1989, la France parle d’intégrisme musulman. Jusqu’à présent, cet intégrisme s’est surtout manifesté à travers le terrorisme, non dans une moindre mesure en lien avec l’Iran comme en témoigne l’affaire Wahid Gordji. Mais la France est sur le point de découvrir que cet intégrisme peut aussi frapper là où elle l’attend le moins, sur un terrain où, ceinte de ses idéaux révolutionnaires, elle se croit inexpugnable. Le terrain de la culture.

Dès 1987, la chanteuse Véronique Sanson envisageait une chanson contre l’intégrisme religieux, racontant l’histoire d’un couple maghrébin se muant en auteurs d’un attentat-suicide par l’explosion d’un camion. Alors qu’elle entend intituler sa chanson Dieu, le chanteur Michel Berger, son ancien compagnon qui produit pour elle l’album devant contenir la chanson, lui suggère de l’intituler Allah en référence à l’extrémisme musulman qui, à travers le monde, s’affirme alors de plus en plus comme une «troisième force» entre les Etats-Unis de Ronald Reagan et l’URSS de Mikhaïl Gorbatchev. C’est ainsi que la chanteuse enregistre Allah, où elle s’en prend directement au Dieu de l’Islam pour les attentats commis en son nom par des fanatiques.

Véronique Sanson

Alors qu’elle s’apprête à donner un concert à l’Olympia, Véronique Sanson reçoit des menaces de mort lui enjoignant de ne pas chanter Allah. Le 14 février 1989, une fatwa est lancée contre elle avec ordre de la tuer. La carrière de la chanson s’arrête là. Mais pas celle de l’extrémisme se réclamant de l’Islam, car bien sûr, Rushdie est le prochain sur la liste.

C’est en septembre 1988 que l’écrivain britannique d’origine indienne, naturalisé américain, publie son quatrième roman, Les Versets sataniques (The Satanic Verses). Les protagonistes, deux artistes indiens vivant en Angleterre contemporaine, se trouvent pris dans un détournement d’avion et, alors que l’appareil explose en plein vol, se voient miraculeusement y survivre puis prendre pour l’un, la personnalité de l’Ange Gabriel et, pour l’autre, celle d’un démon. Ce dernier réussit à ruiner la vie, notamment sentimentale, de son comparse qui le lui pardonne toutefois en bon ange que, selon lui, il est devenu. Tous deux rentrés en Inde, le premier tue sa compagne avant de se suicider, et le second, jusqu’alors brouillé avec son identité indienne ainsi que son propre père, se réconcilie avec les deux et reste vivre dans son Inde natale.

Salman Rushdie

Mais derrière cette histoire de deux Indiens frappés d’une maladie mentale, servant de trame au roman de Rushdie, d’autres parties du roman s’avèrent plus problématiques, du moins pour les Musulmans les plus dogmatiques.

A l’instar de Scorsese mettant en scène un Christ détourné de sa mission salvatrice par un Satan habilement déguisé, Rushdie dépeint Mahomet, le Prophète de l’Islam, adoptant trois divinités païennes de La Mecque en violation du principe islamique du dieu unique, les trois divinités ayant dicté à Mahomet de faux versets du Coran en ayant pris l’apparence d’Allah. Le récit romancé de Rushdie amène ensuite des prostituées de La Mecque à se faire passer pour les épouses du Prophète, puis l’un des compagnons de Mahomet à douter de lui en tant que messager de Dieu et l’accuser d’avoir volontairement réécrit certaines parties du Coran en occultant le verbe divin.

Rushdie poursuit avec le récit, toujours fictif, d’une jeune paysanne indienne affirmant recevoir des révélations de l’Archange Jibreel («Gabriel» en arabe). Elle convainc son village entier d’entreprendre un pèlerinage en marchant jusqu’à La Mecque, affirmant qu’ils pourront tous traverser la mer à pied. Mais les pèlerins disparaissent tous, les témoignages discordant sur leur noyade pure et simple ou leur traversée miraculeuse de la mer comme l’aurait promis l’Archange Jibreel.

Puis Rushdie présente un chef religieux fanatique expatrié, «l’Imam», chef religieux en lequel est aisément reconnaissable l’Imam Ruhollah Khomeini, Guide suprême de la République islamique d’Iran, exilé en France jusqu’à la révolution islamique de 1979.

Après le tollé chez les Chrétiens contre Scorsese, c’est au tour de Rushdie d’enflammer le monde musulman. Au Pakistan, Les Versets sataniques sont interdits et, le 12 février 1989, dix mille personnes manifestent contre lui à Islamabad où le Centre culturel américain et un bureau d’American Express sont mis à sac. L’Inde interdit l’importation de l’ouvrage et des autodafés se font jour en Grande-Bretagne.

En février 1989, c’est au tour de Khomeini d’ajouter à la polémique en édictant une fatwa, littéralement une «opinion juridique», facultative en Islam sunnite mais ayant valeur contraignante chez les Chiites, appelant au meurtre de Rushdie et de ses éditeurs ainsi qu’à faciliter ce meurtre à défaut de le commettre soi-même. En Grande-Bretagne, le Gouvernement conservateur de Margaret Thatcher prend fait et cause pour Rushdie, qu’il place sous protection policière, mais un jeune député travailliste nouvellement élu organise dans sa circonscription une marche pour l’interdiction des Versets sataniques et un ancien leader du Parti conservateur, Norman Tebbit, sans aucun lien personnel avec l’Inde ou l’Islam par ailleurs, condamne et injurie publiquement Rushdie.

Là où Martin Scorsese continue d’aller et venir librement, Véronique Sanson ayant tôt fait de sortir de nouveaux titres et faire oublier Allah, Rushdie se trouve désormais prisonnier d’une alternative qui résume tout son sort – la clandestinité ou la mort.

Héritage humaniste contre héritage de haine

Devenu invisible et introuvable, Rushdie publie en 1995 un nouveau roman, Le dernier soupir du Maure (The Moor’s Last Sigh). Mais, pour avoir perdu en intensité, la menace de Téhéran n’en a pas pour autant disparu. Loin des regards, c’est désormais par procuration que Rushdie continue d’être attaqué.

En 1991, les traducteurs italien et japonais de Rushdie sont assassinés. Deux ans plus tard, un traducteur norvégien des Versets sataniques échappe de peu à une tentative de meurtre par balles puis un traducteur turc manque de succomber à un incendie volontaire qui le visait.

En 1998, l’Iran de Mohammed Khatami, Président se voulant réformiste, annonce la fin de la fatwa contre Rushdie qui, à son tour, abandonne sa vie en clandestinité. Mais en 2006, le conservateur nationaliste Mahmoud Ahmadinejad qui a succédé à Khatami fait marche arrière ; pour lui, une fatwa ne peut être annulée que par la personne qui l’a édictée, et puisque Khomeini est décédé, la fatwa est irréversible. Dix ans plus tard, la prime promise par l’Iran pour le meurtre de Rushdie dépasse les trois millions de dollars, notamment sous l’impulsion des médias iraniens.

Et le 12 août dernier, alors qu’il s’apprête à donner une conférence à la Chautauqua Institution dans l’Etat de New York, Rushdie est poignardé au cou par Hadi Matar, Chiite d’origine libanaise dont les réseaux sociaux grouillent de messages de soutien au régime iranien et d’admiration pour Khomeini. Hospitalisé en urgence, placé sous assistance respiratoire, il est menacé de perdre un œil ; le 14, son agent annonce qu’il se rétablit et respire normalement. En Iran, la presse conservatrice couvre de louanges Hadi Matar qui, ensuite amené devant la justice, plaide non coupable.

En France, d’aucuns convoquent aussitôt le souvenir de l’attentat terroriste du 7 janvier 2015 contre la rédaction de Charlie Hebdo, régulièrement accusé de s’en prendre systématiquement à l’Islam et aux Musulmans, en particulier depuis la publication dans ses colonnes, en 2006, de caricatures de Mahomet parues dans un journal d’extrême droite au Danemark. C’est toutefois après avoir critiqué non l’Islam mais l’islamisme, incarné par le parti tunisien Ennahda et une partie du Conseil national de Transition en Libye, que Charlie Hebdo avait connu en 2011 l’incendie de ses locaux à Paris. Quant à l’attentat ayant décimé sa rédaction, Charlie Hebdo le devait bien à deux terroristes résolus, deux frères membres d’Al-Qaïda en Péninsule Arabique, Cherif et Saïd Kouachi. L’Islam ne tue pas, l’islamisme oui.

Pour les Français, immanquablement, le souvenir de l’attentat contre Charlie Hebdo en appelle un autre, celui de l’assassinat de Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie victime d’un autre attentat terroriste à Conflans-Sainte-Honorine, en région parisienne, le 16 octobre 2020 alors que se tenait justement à Paris le procès des auteurs présumés des attentats de janvier 2015 dont celui contre Charlie Hebdo, en dehors des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly qui avait attaqué l’Hyper Cacher de la Porte de Vincennes. Samuel Paty avait été dénoncé par certains élèves musulmans comme ayant utilisé des dessins parodiques de Mahomet parus dans Charlie Hebdo, ce qui avait fait de lui une cible du seul fait de son enseignement, non contre l’Islam mais en faveur de l’esprit critique.

Étrangère à l’univers anglo-saxon de l’Amérique de Scorsese ou de l’Angleterre de Rushdie, la France qui célébrait sa Révolution s’était retrouvée victime collatérale des deux épisodes mais n’en avait pas connu de semblable pour ses propres artistes, notamment pas pour Véronique Sanson contre laquelle la fatwa aura fait long feu. Inspirée par le Bicentenaire de la Révolution, Isabelle Adjani, l’une des actrices françaises les plus en vogue à l’époque, n’en avait pas moins lu à haute voix un extrait des Versets sataniques lors de la cérémonie des Césars en 1988. Malgré tout, la France républicaine avait bien dû se faire une raison, constatant que les idéaux qu’elle célébrait et voulait universels ne l’étaient pas tant qu’elle le croyait et que, dans cet Occident qui regardait de haut un «Tiers Monde» auquel il imputait l’intégrisme religieux comme une conséquence de son sous-développement, ce même intégrisme existait aussi, non du seul fait de migrants musulmans mais aussi de citoyens de lignée locale depuis des siècles, non du seul fait d’un Islam qui, ailleurs, avait pris les armes mais aussi du même catholicisme qui, le dimanche matin, rassemblait les fidèles devant Le Jour du Seigneur sur la télévision d’État.

Triste préfiguration d’un monde qui, en quittant les années 1980 et par miracle la Guerre Froide, (r)entrait successivement dans la guerre «chaude» avec la campagne militaire internationale pour la libération du Koweït envahi en août 1990 par l’Irak, les guerres balkaniques avec camps d’internement et purification ethnique rappelant sombrement la Shoah, le terrorisme généralisé, ici islamique du fait d’Al-Qaïda et ailleurs d’extrême droite comme à Oklahoma City, et l’extrême droite au pouvoir, fût-ce en coalition gouvernementale, comme en Italie.

D’aucuns en France voudraient penser que tous les chemins mènent non à Rome, mais à Paris, et donc que tous les chemins en partent aussi. En 1789, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen avait bel et bien résonné, pour sa part, loin par-delà les frontières du Royaume de France. Là où les textes constitutionnels américains avaient été scrutés principalement par les ennemis britannique et espagnol de la jeune Amérique indépendante, la proclamation française «en présence de l’Être suprême» avait permis au monde entier de comprendre qu’une nouvelle ère commençait. Deux cents ans plus tard, la fête de ce légitime moment de fierté pour le peuple français lui offrait tout le contraire, l’obscurantisme et la violence venues d’ailleurs convergeant vers Paris pour ternir ce moment de joie et ouvrir la voie à une fin du vingtième siècle qui ne pouvait que laisser craindre le pire.

La Déclaration universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen adoptée le 26 août 1789 (C) Musée Carnavalet – Paris

Aucun respect du droit sans respect de l’écrit

Et le vingt-et-unième siècle n’a pas manqué de tenir les terribles promesses de son prédécesseur. Pire attentat terroriste de l’histoire en 2001, extrême droite au pouvoir dans deux pays d’Europe et ayant manqué de l’être aussi en France en 2002, invasion de l’Irak cette fois sans mandat international en 2003, tortures de civils dans ce même Irak l’année suivante …  La liste serait bien trop longue. Mais une chose est sûre, ce qui était au vingtième siècle le futur ressemble horriblement à ce qui était vu, à l’époque, comme un passé révolu.

Des écrivains comme Rushdie, tous les pouvoirs tyranniques en ont toujours emprisonné, interdit, torturé voire tué. Dans le contexte individuel de 1989, plus encore en France, Rushdie était devenu le symbole vivant d’un mal nouveau, menaçant un monde où le Mur de Berlin était toujours debout même si l’URSS vaincue en Afghanistan semblait à genoux. Mais avec le nouveau siècle est venue l’expansion de la nouvelle technologie, et avec elle, la possibilité d’être auteur sans plus devoir passer par un journal ou une maison d’édition, avec l’apparition des blogs et, pas toujours pour le meilleur, des réseaux sociaux. Et qui dit nouveaux moyens d’expression dit nouvelle peur pour les régimes répressifs, et avec cette nouvelle peur, de nouveaux motifs de répression. Publié sur papier ou autopublié sur Internet, qu’importe aujourd’hui, vous risquez tout autant de payer cher le moindre de vos mots contre qui veut régner en imposant le silence.

Active au sein du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies, l’Association of World Citizens ne s’est jamais limitée pour autant à cette seule enceinte genevoise, ayant toujours porté la défense des Droits Humains partout où elle le peut.

En Tunisie où, depuis un an, les initiatives du Président Kaïs Saied mettent à mal l’héritage de la Révolution de janvier 2011, le journaliste Salah Attia en a fait les frais pour avoir dénoncé ces dérives autoritaires en direct sur la chaîne Al Jazeera. Jugé sur ce seul fondement par des militaires en uniforme, il s’est retrouvé détenu à la prison de Mornaguia près de Tunis. Dans la Libye voisine qui n’a jamais su trouver sa voie nouvelle depuis la révolte populaire contre Mu’ammar Kadhafi, hélas devenue intervention militaire franco-britannique aux motifs plus qu’incertains, c’est Mansour Atti, journaliste lui aussi, mais également blogueur et dirigeant local du Croissant-Rouge, qui fut enlevé en juin 2021 par un groupe armé réputé proche des Forces armées libyennes.

Toujours en Afrique mais plus au sud, dans la Corne du continent, en Somalie où l’État central ne s’est jamais vraiment reconstitué depuis 1990 et la désagrégation du pays après la fin de la dictature de Mohamed Siad Barré, un journaliste indépendant nommé Kilwe Adan Farah fut arrêté en décembre 2020 dans la région autonome de facto du Puntland où il venait de couvrir une manifestation contre les autorités locales. Jugé lui aussi par un tribunal militaire, il fut condamné à trois ans d’emprisonnement pour avoir «répandu des fausses nouvelles et incité au mépris envers l’État». A ce jour, il purge encore sa peine.

Kilwe Adan Farah

Le terrorisme jihadiste en France et ailleurs l’a prouvé : ce qui menaçait Salman Rushdie n’a jamais disparu, tout au plus changé de forme. Mais aujourd’hui, là où un interdit fanatique peut toujours frapper quelqu’un qui s’exprime par l’écrit, l’interdit peut venir également des forces armées dans un pays cherchant sa voie constitutionnelle et, dans le meilleur des cas, démocratique. Quitte à oser vouloir faire croire qu’un écrit public dénué de toute intention malveillante peut menacer un pays tout entier de ne jamais (re)trouver une vie libre et paisible.

En France, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, mais bien sûr pas seulement, la loi permet de saisir la justice contre un écrit public et obtenir soit réparation si l’on est visé à titre personnel, soit condamnation pénale dans le cas d’un abus de la liberté d’expression internationalement reconnaissable comme tel, par exemple à travers la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme. Et ce sera toujours, dans ces trois pays et partout ailleurs dans le monde, une infaillible indication du respect de l’État de droit par opposition à la loi de la jungle ou à celle du talion. Quiconque se reconnaît Citoyen du Monde doit défendre sans faille ces principes, sachant que là où un écrit peut valoir la mort, il n’est aucune responsabilité envers sa communauté locale, a fortiori envers la communauté humaine mondiale, que l’on puisse entendre assumer à moins que ce ne soit, au bout du compte, en vain.

Bernard J. Henry est Officier des Relations Extérieures de l’Association of World Citizens.

Garry Davis: “And Now the People Have the Floor”

In Being a World Citizen, Human Rights, Migration, NGOs, Solidarity, Spirituality, The Search for Peace, Track II, United Nations, United States, World Law on July 24, 2022 at 6:14 PM

By René Wadlow

Garry Davis, who died on July 24, 2013, in Burlington, Vermont, was often called “World Citizen N°1”. The title was not strictly exact as the organized world citizen movement began in England in 1937 with Hugh J. Schonfield and his Commonwealth of World Citizens, followed in 1938 by the creation jointly in the USA and England of the World Citizen Association. However, it was Garry Davis in Paris in 1948-1949 who reached a wide public and popularized the term “world citizen”.

Garry Davis was the start of what I call “the second wave of world citizen action”. The first wave was in 1937-1940 as an effort to counter the narrow nationalism represented by Fascist Italy, Nazi Germany, and militaristic Japan. This first world citizen wave of action did not prevent the Second World War, but it did highlight the need for a wider cosmopolitan vision. Henri Bonnet of the League of Nations’ Committee for Intellectual Co-operation and founder of the United States (U. S.) branch of the World Citizen Association became an intellectual leader of the Free French Forces led by General de Gaulle from London during the War. Bonnet was a leader in the founding of UNESCO — the reason it is based in Paris — and UNESCO’s emphasis on understanding among cultures.

The Second Wave of world citizen action in which Garry Davis was a key figure lasted from 1948 to 1950 — until the start of the war in Korea and the visible start of the Cold War, although, in reality, the Cold War began in 1945 when it became obvious that Germany and Japan would be defeated. The victorious Great Powers began moving to solidify their positions. The Cold War lasted from 1945 until 1991 with the end of the Soviet Union. During the 1950-1991 period, most world citizen activity was devoted to preventing a war between the USA and the USSR, working largely within other arms control/disarmament associations and not under a “world citizen flag.”

The Third Wave of world citizen action began in 1991 with the end of the Cold War and the rise again of narrow nationalist movements as seen in the breakup of the Soviet Union and Yugoslavia. The Association of World Citizens with its emphasis on conflict resolution, human rights, ecologically-sound development, and understanding among cultures is the moving force of this Third Wave.

The two-year Second Wave was an effort to prevent the Cold War which might have become a hot World War Three. In 1948, the Communist Party took over Czechoslovakia, in what the West called a “coup”, more accurately a cynical manipulation of politics. The coup was the first example of a post-1945 change in the East-West balance of power and started speculation on other possible changes as in French Indochina or in 1950 in Korea. 1948 was also the year that the UN General Assembly was meeting in Paris. The United Nations (UN) did not yet have a permanent headquarters in New York, so the General Assembly first met in London and later in Paris. All eyes, especially those of the media, were fixed on the UN. No one was sure what the UN would become, whether it would be able to settle the growing political challenges or “go the way of the League of Nations”.

Garry Davis, born in 1921, was a young Broadway actor in New York prior to the entry of the U. S. in the World War in 1941. Garry Davis was a son of Meyer Davis, a well-known popular band leader who often performed at society balls and was well known in the New York-based entertainment world. Thus, it was fairly natural that his son would enter the entertainment world, as a “song and dance” actor in the musical comedies of those days. Garry had studied at the Carnegie Institute of Technology, a leading technology institution.

When the U. S. entered the war, Garry joined the Army Air Force and became a bomber pilot of the B-17, stationed in England with a mission to bomb targets in Germany. Garry’s brother had been killed in the Allied invasion of Italy, and there was an aspect of revenge in bombing German military targets until he was ordered to bomb German cities in which there were civilians.

At the end of the War and back as an actor in New York, he felt a personal responsibility toward helping to create a peaceful world and became active with world federalists who were proposing the creation of a world federation with powers to prevent war, largely based on the U. S. experience of moving from a highly decentralized government under the Articles of Confederation to the more centralized Federal Government structured by the Constitution.

At the time, Garry had read a popular book among federalists, The Anatomy of Peace by the Hungarian-born Emery Reves. Reves had written “We must clarify principles and arrive at axiomatic definitions as to what causes war and what creates peace in human society.” If war was caused by a state-centric nationalism as Reves, who had observed closely the League of Nations, claimed, then peace requires a move away from nationalism. As Garry wrote in his autobiography My Country is the World (1) “In order to become a citizen of the entire world, to declare my prime allegiance to mankind, I would first have to renounce my United States nationality. I would secede from the old and declare the new”.

In May 1948, knowing that the UN General Assembly was to meet in Paris in September and earlier the founding meeting of the international world federalists was to be held in Luxembourg, he went to Paris. There he renounced his U. S. citizenship and gave up his passport. However, he had no other identity credentials in a Europe where the police can stop you and demand that you provide identity papers. So he had printed a “United World Citizen International Identity Card” though the French authorities listed him as “Apatride d’origine américaine”. Paris after the War was filled with “apatride” people, but there was probably no other “d’origine américaine”.

Giving up U. S. citizenship and a passport which many of the refugees in Paris would have wanted at any price was widely reported in the press and brought him many visitors. Among the visitors was Robert Sarrazac (né Soulage), a career military officer who had been active in the French Resistance and shared the same view of the destructive nature of narrow nationalism and the need to develop a world citizen ideology. Garry was also joined by the young Guy Marchand who would later play an important role in structuring the world citizen movement.

As the French police was not happy with people with no valid identity papers wondering around, Garry Davis moved to the large modern Palais de Chaillot with its terraces which had become “world territory” for the duration of the UN General Assembly. He set up a tent and waited to see what the UN would do to promote world citizenship. In the meantime, Robert Sarrazac who had many contacts from his resistance activities set up a “Conseil de Solidarité” formed of people admired for their independence of thought, not linked to a particular political party. The Conseil was led by Albert Camus, novelist and writer for newspapers, André Breton, the Surrealist poet, l’Abbé Pierre and Emmanuel Mounier, editor of Esprit, both Catholics of highly independent spirits as well as Henri Roser, a Protestant minister and secretary for French-speaking countries of the International Fellowship of Reconciliation.

Davis and his advisors felt that world citizenship should not be left outside the General Assembly hall but had to be presented inside as a challenge to the ordinary way of doing things, “an interruption”. Thus, it was planned that Garry Davis from the visitors’ balcony would interrupt the UN proceedings to read a short text; Robert Sarrazac had the same speech in French, and Albert Crespey, son of a chief from Togo had his talk written out in his Togolese language.

In the break after a long Yugoslav intervention, Davis stood up. Father Montecland, “priest by day and world citizen by night” said in a booming voice “And now the people have the floor!” Davis said “Mister Chairman and delegates: I interrupt in the name of the people of the world not represented here. Though my words may be unheeded, our common need for world law and order can no longer be disregarded.” After this, the security guards moved in, but Robert Sarrazac on the other side of the Visitors’ Gallery continued in French, followed by a plea for human rights in Togolese. Later, near the end of the UN Assembly in Paris, the General Assembly adopted without an opposition vote, the Universal Declaration of Human Rights which became the foundation of world citizens’ efforts to advance world law.

Dr. Herbert Evatt of Australia was the President of the UN General Assembly in 1948. He was an internationalist who had worked during the San Francisco Conference creating the UN to limit the powers of the Permanent Five of the Security Council. Evatt met with Davis a few days after the “interruption” and encouraged Davis to continue to work for world citizenship, even if disrupting UN meetings was not the best way.

Shortly after highlighting world citizenship at the UN, Garry Davis went to the support of Jean Moreau, a young French world citizen and active Catholic, who as a conscientious objector to military service, had been imprisoned in Paris as there was no law on alternative service in France at the time. Davis camped in front of the door of the military prison at the Rue du Cherche-Midi in central Paris. As Davis wrote “When it is clearly seen that citizens of other nations are willing to suffer for a man born in France claiming the moral right to work for and love his fellow man rather than be trained in killing him, as Jesus, Buddha, Lao Tsu, Tolstoy, St Francis of Assisi, Gandhi, and other great thinkers and religious leaders have taught, the world may begin to understand that the conscience of Man itself rises above all artificially-created divisions and fears.” (2). Others joined Davis in camping on the street. Garry Davis worked closely on this case with Henri Roser and Andre Trocmé of the Fellowship of Reconciliation. Davis was put in jail for camping on the city street and also for not having valid identification documents, but his place on the street was filled with others, including a German pacifist, an act of courage so soon after the end of the War. It took another decade before alternative service in France was put into place, but Davis’ action had led to the issue being widely raised in France, and the link between world citizenship and non-violent action clearly drawn.

Garry Davis was never an “organizational man”. He saw himself as a symbol in action. After a year in France with short periods in Germany, he decided in July 1949 to return to the U. S. As he wrote at the time “I have often said that it is not my intention to head a movement or to become president of an organization. In all honesty and sincerity, I must define the limit of my abilities as being a witness to the principle of world unity, defending to the limit of my ability the Oneness of man and his immense possibilities on our planet Earth, and fighting the fears and hatreds created artificially to perpetuate narrow and obsolete divisions which lead and have always led to armed conflict.”

Perhaps by the working of karma, on the ship taking him to the USA, he met Dr. P. Natarajan, a south Indian religious teacher in the Upanishadic tradition. Natarajan had lived in Geneva and Paris and had a doctorate in philosophy from the University of Paris. He and Davis became close friends, and Davis spent some time in India at the center created by Natarajan who stressed the development of the inner life. “Meditation consists of bringing all values inside yourself” was a motto of Natarajan.

It was at the home of Harry Jakobsen, a follower of Natarajan, on Schooly Mountain, New Jersey that I first met Garry Davis in the early 1950s. I was also interested in Indian philosophy, and someone put me in contact with Jakobsen. However, I had joined what was then the Student World Federalists in 1951 so I knew of the Paris adventures of Garry. After that, we would meet in Geneva, France, and the U. S. from time to time.

Some world federalists and world citizens thought that his renunciation of U. S. citizenship in 1948 confused people. The more organization-minded world federalists preferred to stress that one can be a good citizen of a local community, a national state as well as a world citizen. However, Davis’s and my common interest in Asian thought was always a bond beyond any tactical disagreements.

Today, it is appropriate to cite the oft-used Indian image of the wave as an aspect of the one eternal ocean of energy. Each individual is both an individual wave and at the same time part of the impersonal source from which all comes and returns. Garry Davis as a wave has now returned to the broader ocean. He leaves us a continuing challenge writing “There is vital need now for wise and practical leadership, and the symbols, useful up to a point, must now give way to the men qualified for such leadership.”

Notes

1) Garry Davis, My Country is the World (London: Macdonald Publishers, 1962)

2) Garry Davis, Over to Pacifism: A Peace News Pamphlet (London: Peace News, 1949)

Prof. René Wadlow is President of the Association of World Citizens.

Horace Alexander: Unofficial Diplomacy and Mediation

In Asia, Being a World Citizen, Conflict Resolution, NGOs, Spirituality, The Search for Peace, Track II on June 6, 2022 at 3:12 PM

By René Wadlow

At this time of increased tensions and armed conflicts in different parts of the world, it is useful to recall the positive possibilities of unofficial diplomacy. Unofficial diplomats recognize that the suspicions of government officials are a major hurdle to overcome and that they must emphasize their impartiality and independence from governments. Preparing the way for official policy changes or for improved interstate relations is a slow-building evolutionary process. Personal contacts across borders hold the potential for influencing the knowledge and attitudes of those involved as well as the ability to gain information.

Horace Alexander (1889-1989), the British Quaker and friend of Mahatma Gandhi, is a good example of the unofficial diplomat and mediator. Horace Alexander was born in an English Quaker family. His father was a lawyer deeply involved in peace efforts and in opposing the opium trade active between India and China. Horace Alexander was a Cambridge University graduate who went on to teach international relations at Woodbroke, an adult education center run by Quakers. Alexander was very active in efforts to support the League of Nations.

In 1926 and 1927 there was increased agitation and repression in India as the Indian National Congress became increasingly active. Thus in 1928 Horace Alexander was sent to India by the British Quakers to see if relations between the Vice Roy Lord Irwin and Mahatma Gandhi could be improved. Alexander saw the spiritual dimension of Gandhi but also his political impact and suggested to the British government that Gandhi be invited to the Roundtable on Indian politics which was to be held in London in 1931.

Alexander developed close relations with Gandhi and divided his time between India and England. He was active in relief work during the famine in Bengal in 1943-1944 and was active with the Indian National Congress during the negotiations which led to independence in 1947, but he sensed the birth pangs of the creation of the two states of India and Pakistan and the terrible days of partition when fighting between religious communities took a deadly toll in human life and spirit.

While he was with Gandhi in India, seeing the growing divide between Hindus and Muslims, he created the Fellowship of Friends of Truth. As he wrote “The basis and goal of the Fellowship of Truth will be a common striving toward fuller knowledge of the Truth that is God. Members will commit themselves to learn with and from one another of the things that are eternal, through common acts of quiet worship and meditation and through other forms of communion with God and man.” Horace Alexander lived his later years in the United States and died at the age of 100.

Unofficial diplomacy rarely creates a breakthrough as situations can be completely blocked and even minimal proposals are unacceptable at the time. However, small steps can be useful if taken in the right direction. Unofficial Diplomacy, which is increasingly called Track II diplomacy, is growing in importance and merits support.

Prof. René Wadlow is President of the Association of World Citizens.

The Fire of Love: A Sufi Path in Islam

In Asia, Being a World Citizen, Cultural Bridges, Middle East & North Africa, Solidarity, Spirituality, The Search for Peace on November 28, 2021 at 5:45 PM

By René Wadlow

Enough of phrases and conceits and metaphors!

I want burning, burning, become familiar with

that burning! Light up a fire of love in thy soul,

Burn all thought and expressions away.

Jalal al-Din Rumi

Sufism — mysticism in the Islamic world — has flourished chiefly in Arab countries and in Persia, and later in what is now India and Pakistan. In Persia and the Indian Sub-continent, Sufism built upon earlier pre-Islamic traditions of mystic thought. As Walter Stace noted in his Teachings of the Mystics, “The natural drift toward pantheism which is a general feature of mysticism in the West — where the theologians and ecclesiastical authorities try to suppress it and brand it as heresy — is even more pronounced in Sufism than in Christianity — although Muslim orthodoxy disapproves of it quite as emphatically as Christian orthodoxy does. Indeed, the Islamic disapproval may be stronger than the Christian, owing to its more rigid monotheism. After all, no Christian mystic was ever martyred for his pantheistic utterances, whereas this did happen in Baghdad” to Al Hallaj in 922.

Sufism is not one homogeneous body of thought or a well-defined set of doctrines and practices. There is considerable internal diversity. However, central to Sufi practice is the role of the spiritual teacher (pir or sheikh) who is believed to have received esoteric wisdom from his own master forming a chain. The role of the teacher has always been to guide the disciple in ways of meditation or other mystical practices often related to breathing so he would acquire spiritual insight through inner experience.

Jalal al-Din Rumi

These chains can be considered separate spiritual orders. Often the tomb of a Sufi leader becomes a shrine and a pilgrimage site. In Pakistan recently, there have been armed attacks on popular Sufi shrines carried out by more legalistic Muslim groups.

Spirituality, in the Sufi tradition, cannot be set apart from life itself, and spiritual development can only be realized through living life to the fullest expression of our potential, using all of our human faculties with the ideal of becoming a more complete human being.

In Europe and the USA, one of the best known of the Sufi ‘chains’ is that of an Indian teacher Hazrat Inayat Khan, of the Chishti Sufi Order, named after the Indian town where it had its headquarters who came to the West in 1910 to create a Sufi movement in North America and Europe. He set his headquarters in Geneva, an international city because of the League of Nations. He married Ora Baker, a cousin of Mary Baker Eddy, founder of The Christian Science Monitor. His son Vilayat Inayat Khan succeeded him. In 2000, the grandson Zia Inayat Khan assumed leadership of what has become the Sufi Order International.

In the West, the Islamic base of the teaching is rarely stressed though it is not denied. Most of the members do not come from traditional Muslim families. Here in France where I have had some contacts, most members are not from North Africa which makes up the bulk of the Islamic population but are rather Europeans who are looking for meditation techniques and who could have chosen Tibetan Buddhism had a different opportunity presented itself.

Pir Vilayat Inayat Khan

Pir Vilayat has written on the aims of his work: “I am trying to develop an updated spirituality for our times. I believe that to develop our own being to the highest potential we need to discover our ideal and allow an inborn strength, a conviction in ourselves, to give us the courage toward developing this ideal. This requires both knowing our life purpose and mastery or discipline over ourselves in terms of body, mind, and emotions. With an attitude of joy and enthusiasm, we do not suppress but instead control and direct impulses toward the fulfillment of our goals.”

There is a good deal of emphasis placed on “opening the heart” and love as love is considered an attribute of God. Pir Vilayat wrote “When the light of love has been lit, the heart becomes transparent, so that the intelligence of the soul can see through it; but until the heart is kindled by the flame of love, the intelligence, which is constantly yearning to experience life on the surface, is groping in the dark.”

Philip Gowins has written a useful introduction which outlines exercises linked both to breathing and to creative visualization in meditation. The subtitle of the book is “A Field Guide to the Spiritual Path” (1). However, the emphasis is on the need for a teacher as writings are only of limited help and in working alone one may misjudge one’s own progress on the path.

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Note

1) Philip Gowins. Practical Sufism: A Guide to the Spiritual Path (Wheaton, IL: Quest Books, 2010, 219 pp.)

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Prof. René Wadlow is President of the Association of World Citizens.

Letting the Soul of Europe Drown on the Shores of Libya

In Africa, Being a World Citizen, Conflict Resolution, Current Events, Europe, Human Rights, Libya, Middle East & North Africa, Migration, NGOs, Refugees, Spirituality, The Search for Peace, Track II, United Nations, World Law on July 26, 2021 at 6:15 PM

By Bernard J. Henry

Was Libya ever a part of the 2011 Arab Spring? If the term defines solely the ouster of a dictator who had been there for decades, yes, it was. After 41 years of autocratic rule, Colonel Muammar Gaddafi was irreversibly overthrown. If the Arab Spring also means the transformation of nonviolent protests into all-out armed conflict, then again, Libya qualifies as a people’s revolution, following the path successfully taken by Tunisia, that ended up as a civil war between the Jamahiriya, ruled from Tripoli by Gaddafi, and the Qatar-backed National Transitional Council based in Benghazi. Ultimately, if it means frustration at the outcome of the fight, then Libya was indeed a part of the 2011 Arab Spring, remembering how unbearably long it took the rival factions there to create a Government of National Unity, after years of competition between two, sometimes three, would-be national leaders.

Another way that Libya – tragically – qualifies as part of the 2011 Arab Spring is the ever-growing phenomenon of harraga. In Algerian Arabic, harrag means “the one who burns something”, and in Algeria where French is an unofficial second language, overlooking a red light while driving a car is “brûler un feu rouge”, literally “burning a red light”. When harrag thus refers to anyone breaching a legal restriction, its plural harraga has come to mean “those who burn the border” – migrants who leave the country without permission, either from their home government or the authorities of the country they are traveling to, in both cases risking their very lives.

One reason the West reacted sometimes coolly to the end of decades-long dictatorships in North Africa was that, while in power, Ben Ali, Gaddafi, and Mubarak enforced strict regulations on migration to the northern bank of the Mediterranean, keeping their respective peoples away from both personal freedom and European border posts altogether. The fall of each of the three regimes meant the end of a controlled emigration that used to suit European needs nicely, and ten years later, one of the three countries stands out as the most graphic and tragic embodiment of the harraga phenomenon – Libya.

Yet Libyans do not make up the bulk of those vowing to reach Europe at any cost. Those vowing to reach Europe from Libya are migrants and refugees from other countries in Africa, with some foreign residents who had lived in Libya for many years but are now feeling insecure and want to move on abroad. Others still, coming from Niger, Chad, Sudan, Egypt, and Tunisia, do want to settle down in Libya. But for those whose destination is Europe, when failure does not come by drowning into the Mediterranean, it means a fate some would deem even worse.

Inhumanity in the name of the European Union

According to a report from the United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR), North Africa is now offering three routes for migration to Europe – the Western Route from Morocco into Spain, the Eastern Route from Turkey into Greece, and the Central Route from Libya into Italy. Unsurprisingly, the Central Route is the most active, preferred by many refugees and migrants. They come from West, East, and Central Africa, some of them fleeing extreme poverty back home and the others running from war and persecution. Although Europe has the oldest and best-functioning human rights court in the world, nostalgic as it is of its unenviable dictator friends in North Africa, it will not lift a finger to help these people yearning for the freedom and dignity that Europeans enjoy them every day.

In a newly released report entitled ‘No One Will Look for You’: Forcibly Returned from Sea to Abusive Detention in Libya, Amnesty International explains how “men, women and children intercepted while crossing the Mediterranean Sea and forcibly returned to detention centers in Libya” get subjected to an array of human rights violations in detention centers, such as “torture and other ill-treatment, cruel and inhuman detention conditions, extortion and forced labor” as well as “invasive, humiliating and violent strip-searches”, when not rape.

The organization sheds light on the role played since 2020 by the Libyan Government’s Directorate for Combating Illegal Migration (DCIM) in sexual abuses against women.

But, in the words of Amnesty’s Deputy Director for the Middle East and North Africa, Diana Eltahawy, “The report also highlights the ongoing complicity of European states that have shamefully continued to enable and assist Libyan coastguards in capturing people at sea and forcibly returning them to the hellscape of detention in Libya, despite knowing full well the horrors they will endure.” Consequently, Amnesty urges “European states to suspend cooperation on migration and border control with Libya”.

Blocking unauthorized migration from North Africa to Europe was one thing, when many in Western countries deemed Arab peoples unable to sustain democracy, thus supporting dictators who both reined in their constituents at home and deterred them from seeking a better life, let alone freedom, abroad. Ten years later, as a stifled democracy proves unable to protect Tunisia from a deadly wave of Covid-19 and Egypt appears locked in an absolute monarchy in all but name, Libya has set a course on the abandonment of all standards of human decency, not just in the treatment of prisoners but in knowingly punishing people just for seeking a new life on the other side of the Mediterranean.

The European ideal betrayed

It is no secret that European leaders, however progressive and opposed to extreme right populists they claim to be, have long renounced any form of firmness toward these. No more dismissing the far right by comparing it to pre-World War II fascist movements; its trademark xenophobic rhetoric has now become trendy. Leaders who once blasted the extreme right can now be heard calling for tighter border controls, making life harder for those immigrants who do get admitted, and demoting asylum from an internationally recognized right to a temporary commodity granted at the pleasure of the state.

Denmark, once hailed as a model Scandinavian social democracy with a liberal line of thought, is now considering sending Syrian refugees back to their war-torn homeland and “outsourcing” other asylum-seekers to Rwanda, a distant central African country with no geographical, historical, or other ties to Denmark whatsoever. In Britain, Home Secretary Priti Patel has proposed a host of nonsensical, dangerous measures to keep undocumented migrants and asylum seekers from reaching the country, such as the creation of an offshore processing center in … Rwanda. Not the finest tributes to the scores of Rwandans trying to flee the ongoing genocide back in 1994 one might think of.

Once conservative, moderate, liberal, or progressive democrats, the leaders of Europe have now joined the extreme right if only in its crusade to spread an insane fear of millions of Arab and African Muslim migrants taking over Europe, replacing the European Convention on Human Rights with the Sharia, imposing the Islamic veil on all women, and flogging to death anyone who swallows a drop of alcohol. So much for the European dream of Konrad Adenauer and Winston Churchill, Frenchmen Jean Monnet and Robert Schuman, and Italians Alcide de Gasperi and Altiero Spinelli – the latter’s name being part also of the history of the World Citizen and World Federalist movements.

As the motto of the European Union (EU) shifts from “United in Diversity” to “Freedom within, Fortress without”, Libya stands out as the most graphic, horrendous illustration of EU duplicity in championing human values at home, especially when opposing a Donald Trump in the USA or brutal leaders in China and Nicaragua, while condoning the total loss of humanity in North Africa where Libyan government agents keep its borders safe from – imagined – hordes of invaders poised to feast on Europe’s riches and force an Al-Qaida- or ISIS-like reactionary vision of Islam on all Europeans. That too is a sign, possibly the most important one, that when it comes to migration, European leaders are now being guided by the extreme right’s ideology, pretending to use facts but being really based on fantasy.

Europe must continue to stand for hope

It is no fantasy that people are dying at sea while trying to reach Europe. It is no fantasy that others, also trying to reach Europe through the Mediterranean, are getting caught by the Libyan authorities and forcibly brought back to the country. It is no fantasy that, held in detention centers even though they have no crime to answer for, people are ill-treated, beaten, raped, all but killed, just because they tried to get to Europe. It is no fantasy that as many blatant violations of the European Convention on Human Rights are being committed while the EU, at best, turns a blind eye and, at worst, lends its support.

Regional integration as Europe has known it since World War II, including EU expansion after the end of the Warsaw Pact, cannot be allowed to result in such barbarity. Setting such a bad example will only be detrimental to the ongoing experiments toward regional integration in other parts of the world, obviously starting with Africa. Ultimately, the very idea of World Citizenship will be endangered too, should some raise the possibility of supranational integration, and accordingly global governance of any kind, leading to such brutal, inhuman conducts of that nature with literally nowhere to run.

Europe as we know it was born among the ruins of World War II. Neither its regional institutions nor its national governments, let alone its governmental partners overseas, can possibly let it drown on the shores of Libya, where its leaders from Rome up to Copenhagen are making the EU lose all honor, letting down both those in Libya hoping for a better future and their own citizens at home by nurturing them in fear when they should be taught pride, courage, and solidarity, both toward one another and with others in distress at the doorsteps of the Union.

Bernard J. Henry is the External Relations Officer of the Association of World Citizens.