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Le droit universel à la fraternité

In Being a World Citizen, Cultural Bridges, Fighting Racism, Human Rights, Solidarity, The Search for Peace, Uncategorized, World Law on February 11, 2014 at 9:25 PM

LE DROIT UNIVERSEL A LA FRATERNITE

Par Bernard Henry

(D’après « The Universal Right to Brotherhood », du même auteur :

https://awcungeneva.com/2014/02/10/the-universal-right-to-brotherhood/)

En tant qu’Organisation Non-Gouvernementale (ONG) dotée du Statut Consultatif auprès de l’ONU et active au sein du Conseil des Droits de l’Homme, l’Association of World Citizens a toujours défendu les Droits de l’Homme partout dans le monde, tous les Droits de l’Homme, qu’ils soient civils, politiques, économiques, sociaux, culturels ou autres, tels que ceux plus récemment reconnus au développement et à un environnement sain.

Depuis le début de la décennie, le désir mondial de Droits de l’Homme est plus visible que jamais auparavant. Mais les nombreux auteurs de violations auxquels le peuple du monde doit faire face – les gouvernements des Etats, les corporations multinationales, les groupes politiques non-étatiques, armés ou non – balaient ouvertement les Droits de l’Homme comme étant de simples revendications politiques qui en valent d’autres, leur refusant le moindre caractère de prérogatives universelles reconnues en droit international.

Parfois même, les gouvernements répressifs et autres entités qui le sont tout autant vont jusqu’à prétendre qu’ils agissent au nom même des Droits de l’Homme, accusant en cela leurs critiques et leurs opposants d’attenter eux-mêmes aux Droits de l’Homme.

C’est comme si chacun ne revendiquait plus les Droits de l’Homme qu’à son seul profit, ignorant superbement autrui et considérant les Droits de l’Homme comme étant tout ou rien – mes droits ou les leurs, l’un ou l’autre mais pas les deux. Rien ne saurait être plus contraire à l’idée même de défense des Droits de l’Homme.

Le Préambule de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, depuis 1948 clé de voûte du droit international des Droits de l’Homme, affirme très clairement qu’une protection effective des Droits de l’Homme par la loi est essentielle « pour que l’homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l’oppression ». Même si certains peuvent voir en les Droits de l’Homme une question trop « conflictuelle » à aborder, ignorer ou renier les Droits de l’Homme rend bel et bien impossible à toute personne, tout gouvernement, ou toute autre entité que ce soit, d’espérer en tout bon sens atteindre une quelconque paix ou un quelconque progrès dont il ou elle puisse tirer parti.

L’Article Premier de la Déclaration se fait encore plus explicite sur ce point :

« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. »

Fraternité – c’est bien là le mot qui compte, car c’est là tout ce que les Droits de l’Homme veulent dire.

Se soucier de son prochain, un être humain comme soi-même. Accorder de l’importance à la vie, la liberté, la sécurité d’un ou d’une autre autant qu’aux siennes propres. Vouloir faire le bien des autres plutôt que de concevoir sa propre vie comme un combat permanent et inexorable contre tous. C’est cela, vivre « dans un esprit de fraternité », et partant de là, respecter les Droits de l’Homme, à commencer par le plus essentiel d’entre eux – le droit à la fraternité.

Même s’il est devenu très à la mode de chercher des noises à autrui en invoquant les Droits de l’Homme, se conduire ainsi n’a aucun sens, dans la mesure où la défense des Droits de l’Homme doit être par essence inclusive et jamais sectaire. Lorsque l’on reconnait le droit à la fraternité en tant que droit inaliénable devant être garanti à toutes et à tous, l’on en vient tout naturellement à reconnaître tous les autres droits consacrés par la Déclaration et par bien d’autres instruments internationaux de Droits de l’Homme – civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

La Déclaration universelle des Droits de l'Homme en langue française, langue maternelle de son principal créateur, le Français René Cassin.

La Déclaration universelle des Droits de l’Homme en langue française, langue maternelle de son principal artisan, le Français René Cassin.

Dans la droite ligne de ce principe, la Déclaration se termine sur trois articles rappelant la primauté du droit à la fraternité sur tous les autres :

Article 28

« Toute personne a droit à ce que règne, sur le plan social et sur le plan international, un ordre tel que les droits et libertés énoncés dans la présente Déclaration puissent y trouver plein effet. »

Bien évidemment, cela veut dire que chacun a droit à la paix, et plus évident encore, il ne peut y avoir de paix sans la fraternité.

Article 29

« 1. L’individu a des devoirs envers la communauté dans laquelle seul le libre et plein développement de sa personnalité est possible. 

2. Dans l’exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun n’est soumis qu’aux limitations établies par la loi exclusivement en vue d’assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d’autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l’ordre public et du bien-être général dans une société démocratique. 

3. Ces droits et libertés ne pourront, en aucun cas, s’exercer contrairement aux buts et aux principes des Nations Unies. »

Peut-on être plus clair ? L’on ne peut jouir de ses droits qu’au sein de la communauté humaine, « dans un esprit de fraternité », donc, ni en dehors de la communauté ni contre la communauté.

Article 30

« Aucune disposition de la présente Déclaration ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu un droit quelconque de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés. »

La plus forte, et la plus logique, conclusion possible à une déclaration universelle des droits – les droits ne peuvent être revendiqués, à plus forte raison utilisés, pour faire du tort à qui que ce soit, ce en aucune circonstance. En d’autres termes, si vous ne reconnaissez pas le droit à la fraternité, vous ne pouvez tout simplement pas vous prévaloir de vos droits du tout.

Jargon juridique mis à part, ce n’est là rien d’autre que ce que disait déjà Albert Schweitzer lorsqu’il a créé son concept de Respect de la Vie (Ehrfurcht vor dem Leben). Dans son livre paru en 1923, La Civilisation et l’Ethique, Schweitzer résumait ce concept ainsi : « L’éthique n’est rien d’autre que le Respect de la vie. Le Respect de la vie me fournit le principe fondamental de la morale, à savoir que le bien consiste à entretenir, assister et mettre en valeur la vie, et que détruire la vie, lui faire du tort ou y faire obstacle est mal. »

En un temps où il n’existait aucune véritable institution politique ou juridique au niveau mondial, ce qui s’en rapprochait le plus étant une Société des Nations bâtie pour l’essentiel sur des vœux pieux et dénuée de tout pouvoir de promulguer des lois, Schweitzer proclamait déjà, de la manière la plus claire qui puisse être, le droit universel à la fraternité.

En 1952, la philosophie de "Respect de la Vie" valut à Albert Schweitzer le Prix Nobel de la Paix.

En 1952, la philosophie du “Respect de la Vie” valut à Albert Schweitzer le Prix Nobel de la Paix.

Plus le « respect », selon l’idée que Schweitzer s’en faisait, du droit à la fraternité est important, plus l’oppression et l’injustice ont du mal à s’installer dans une société. Que l’on se batte contre une dictature, que l’on engage le combat contre des politiciens qui propagent le racisme, que l’on manifeste pour un salaire décent, que l’on dispense un enseignement à des enfants démunis ou que l’on fournisse à un village isolé l’accès à l’eau potable, l’on affirme une seule et même chose : nous sommes citoyens du monde entier, l’humanité est notre famille, et en tant qu’êtres humains, nous avons le droit de vivre en famille avec nos frères sur la Terre.

Bernard Henry est Officier des Relations Extérieures du Bureau de Représentation auprès de l’Office des Nations Unies à Genève de l’Association of World Citizens.

The Universal Right to Brotherhood

In Being a World Citizen, Cultural Bridges, Fighting Racism, Human Rights, Solidarity, The Search for Peace, World Law on February 10, 2014 at 7:47 PM

THE UNIVERSAL RIGHT TO BROTHERHOOD

By Bernard Henry

As a Nongovernmental Organization (NGO) in Consultative Status with the United Nations (UN) and accredited with the UN Human Rights Council, the Association of World Citizens has always stood up for human rights everywhere in the world, all human rights, whether civil, political, economic, social, cultural or others, such as the more recently recognized rights to development and to a sound environment.

Since the beginning of this decade, the global yearning for human rights has been more visible than ever before. But the many violators to whom the people of the world have had to stand up – national governments, multinational corporations, non-state political groups, whether armed or not – have been openly dismissing human rights as mere political claims pro se, denying these may ever be a universal prerogative officially recognized in international law.

Sometimes repressive governments or other entities even claim to be acting in the very name of human rights, accusing their critics and opponents of being themselves human rights offenders.

It looks like everybody is now claiming human rights for their sole benefit, totally leaving out others and viewing human rights as a zero-sum game – my rights or theirs, it can’t be both. That is completely out of line with the concept of human rights advocacy.

The Preamble to the Universal Declaration of Human Rights, since 1948 the cornerstone of international human rights law, makes it clear that effective legal protection of human rights is essential “if man is not to be compelled to have recourse, as a last resort, to rebellion against tyranny and oppression”. Even though some people may think of human rights as an overly “divisive” issue to deal with, ignoring or rejecting human rights makes it impossible for any person, government, or other to sensibly hope to achieve any peace or progress for their own enjoyment.

Article 1 of the Declaration is even more explicit about it:

“All human beings are born free and equal in dignity and rights. They are endowed with reason and conscience and should act toward one another in a spirit of brotherhood.”

Brotherhood – that is the one word that counts, for that is just what human rights are all about.

Caring for one’s fellow human being. Valuing another person’s life, liberty, and safety like one’s own. Wishing well on others rather than thinking of one’s own life as an inescapable, permanent fight against everybody else. That is what it means to live “in a spirit of brotherhood”, and accordingly, to respect human rights, starting with the most essential of them all – the right to brotherhood.

Although it has become fashionable to antagonize others while citing human rights, a conduct like that makes no sense, as the defense of human rights shall be by essence inclusive, never sectarian. In recognizing the right to brotherhood as an inalienable right to be guaranteed for everyone, one naturally comes to recognize all other rights enshrined in the Declaration and other international human rights instruments – civil, political, economic, social and cultural.

The Universal Declaration of Human Rights in French, the mother tongue of its main initiator, Frenchman René Cassin.

In line with this principle, the Declaration ends with three articles that recall the primacy of the right to brotherhood over all other rights:

Article 28

“Everyone is entitled to a social and international order in which the rights and freedoms set forth in this Declaration can be fully realized.”

Obviously, this means everyone has a right to peace, and more obviously still, there can be no peace without brotherhood.

Article 29

“(1) Everyone has duties to the community in which alone the free and full development of his personality is possible.

(2) In the exercise of his rights and freedoms, everyone shall be subject only to such limitations as are determined by law solely for the purpose of securing due recognition and respect for the rights and freedoms of others and of meeting the just requirements of morality, public order and the general welfare in a democratic society.

(3) These rights and freedoms may in no case be exercised contrary to the purposes and principles of the United Nations.”

Clear as day. Rights are there to be enjoyed within the human community, “in a spirit of brotherhood”, thus neither apart from the community nor against the community.

Article 30

“Nothing in this Declaration may be interpreted as implying for any State, group or person any right to engage in any activity or to perform any act aimed at the destruction of any of the rights and freedoms set forth herein.”

The strongest, most logical possible conclusion to a universal declaration of rights – rights can never be claimed, let alone used, to do any harm to anyone under any circumstances. In other words, if you don’t recognize the right to brotherhood, you just cannot claim any rights at all.

All legalese aside, that is just what Albert Schweitzer was already saying when he developed his concept of Reverence for Life (Ehrfurcht vor dem Leben). In his 1923 book Civilization and Ethics, Schweitzer outlined the concept in these words: “Ethics is nothing other than Reverence for Life. Reverence for Life affords me my fundamental principle of morality, namely, that good consists in maintaining, assisting and enhancing life, and to destroy, to harm or to hinder life is evil.”

At a time when there was no real global political or legal institution in existence, the closest thing to it being a League of Nations largely built on wishful thinking and with no lawmaking powers, Schweitzer was already asserting, in the plainest possible manner, the universal right to brotherhood.

In 1952 Albert Schweitzer was awarded the Nobel Peace Prize for his philosophy of “Reverence for Life”.

The greater the “reverence”, as Schweitzer said, for the right to brotherhood, the harder it gets for oppression and injustice to settle down. Whether fighting a dictatorship, confronting racist politicians, demonstrating for decent wages, teaching poor children or providing a remote community with access to clean water, it all comes down to stating loud and clear this one universal claim: We are citizens of one world, humanity is our family, and as human beings, we all have a right to family life with our brothers on earth.

Bernard Henry is External Relations Officer of the Representative Office to the United Nations in Geneva of the Association of World Citizens.